Père de famille
Comment regarder un film aussi juste, et aussi dur que "Ceux qui travaillent", quand on a soi-même eu un parcours professionnel de cadre, qu'on a été (et reste) soutien d'une famille, et qu'arrive...
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le 29 sept. 2019
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S’il y a un sujet qui m’intéresse particulièrement c’est le regard que l’on peut avoir sur son travail, les choix que l’on fait leur impact. On pourrait penser qu’il est inutile de se poser cette question futile, trop intello pour qu’elle soit vraiment prise au sérieux. Et généralement ca arrange bien…
Pourtant, si beaucoup d’entre nous ne choisissent pas vraiment leur voie, d’autres ont par contre la chance de pousser leur métier au-delà de la simple idée de travailler pour vivre. On ne devient pas, par exemple, huissier de justice par hasard, il faut acheter sa charge. Payer pour devenir huissier et parfois pour faire ce métier, finir de dépouiller des gens déjà sur la paille.
Lorsque l’on décide d’entrer dans l’armée, on sait qu’a un moment, peut-être, on sera amené à tuer son prochain, même via un drone, cela ne change rien à l’affaire. Que lorsque l’on devient CRS… parce que l’on n’a pas envie de crever de faim, il faudra jouer de la matraque, du tabassage et de la bombe lacrymo. On entre sciemment dans un système pour en devenir un rouage. Tout ça pour quoi ? Par idéologie ? Certainement pas, on ne bosse pas dans un abattoir par idéologie à moins de détester les animaux. On ne devient pas trader ou sa version low cost, banquier, pour le plaisir d’aider son prochain. On le fait pour l’argent, éventuellement sa famille et ses proches.
Ainsi chacun fait comme il peut et surtout comme il veut. Un trader va gérer des actions mais derrière ce sont des emplois, des personnes qui travaillent qui seront touchées si le type se craque. Un chimiste va ajouter un ingrédient pour rendre vos friandises préférées succulentes au point de ne plus pouvoir s’arrêter. Et puis un jour le cancer ou une quelconque maladie cardiovasculaire vous terrassera. Pendant ce temps-là à l’autre bout du monde un inconnu vous appel pour vous proposer l’isolation a 1€, puis un autre une mutuelle dont vous n’avez jamais entendu parlé et encore un autre avec cette fois un accent chinois pour vous proposer de refaire les combles de votre maison… gratuitement. Qu’est-ce qu’ils en savent les chinois des combles de ma maison bordel ? Un système de harcèlement téléphonique ou les protagonistes se trouvent à la pelle juste parce ce que c'est la misère ou le centre d'appel. Ça, nos amis les DRH, des humains encore... profitent pleinement de cette situation.
A l’autre bout de l’atlantique, des personnes crée le téflon qui sera l’un des éléments les plus toxiques existant actuellement. Dans la société DuPont qui produit le téflon, une autre personne va faire en sorte de repousser au maximum l’interdiction de cette molécule sachant pourtant qu’elle est hautement toxique. Chez Volkswagen on décide en connaissance de cause de truquer les calculateurs moteur pour faire croire que votre fidèle et solide voiture « deutsch qualitat » ne rejette que de l’oxygène, oui le Co2 c’est de l’histoire ancienne !
Chez les GAFAM on embauche des développeurs près a tout, car trop fiers de travailler pour ces « prestigieux » mastodontes de l’informatique, pour servir leur grand seigneur en leur offrant leur supra intelligence de singe savant tout ça pour… piquer les données de vie privé de leurs utilisateurs ! Et ils acceptent ça sans broncher, on l’aura deviné.
Vous allez au supermarché faire vos courses et vous ne pouvez plus échapper au BIO, hier marginal aujourd’hui si simple à acheter, que l’on croirait que Monsanto à fait faillite. Ces mêmes lobbies, derrière lesquels des humains travaillent, pour que le BIO ne soit plus qu’un label parmi d’autres… tout aussi remplis de pesticide évidement. Au détour d’un rayon vous apercevez les marques tristement célèbres de lait en poudre du groupe Lactalis, pleines d’huile minérale mais que cet industriel ne daigne pas retirer de la vente parce que « faut pas gâcher ».
Et puis il y a Frank Blanchet logisticien de son état qui lorsqu’un passager clandestin est trouvé sur l’un des porte container dont il a la charge, décide tout naturellement de le passer par-dessus bord… parce que sinon ça coute cher de le ramener chez lui, vous voyez le genre…
C’est ça l’histoire de « Ceux Qui Travaillent », tous ces Hommes qui prennent des décisions humainement discutables, en toute connaissance de cause, juste pour assouvir leur confort et éventuellement ceux de leurs proches. Les « autres », les victimes, étant finalement la raison de leur « travail ». Parce que oui, vous l’aurez compris, derrière chaque exemple qui étaye cette critique il y des humains, des femmes et de hommes qui ont pris ces décisions, elles ne sont pas fruit d’une erreur mais bien d’un choix conscient.
Alors je ne peux pas entrer dans la tête de ces personnes, et ce n’est pas l’envie qui me manque, pour savoir pourquoi elles font ces choses abjectes. Toutefois ce film tente de lever un peu le voile sur les secrets inavouables de ces travailleurs « méritants » que l’on glorifie sur l’autel de la méritocratie… tout en gardant un silence de plomb quand il s’agit de cacher ce qu’est vraiment leur métier. Toutes ces choses inavouables, qui méritent un salaire de compétition, une piscine, un Iphone 42 et tout une tripoté de gosses de riche vivant dans une insouciance aussi crasse que ne l’est le métier de leurs parents.
PS : j’évite le point godwin mais ça m’a démangé fortement. Ça m’aurais évité d’en écrire une tartine, parce que plus démonstratif… malheureusement.
Créée
le 2 avr. 2021
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