Un des films les plus méconnus de Clint Eastwood est pourtant l'un des meilleurs qu'il m'a été donné de voir. Ce que j'aime chez un réalisateur, ce n'est pas tellement sa façon de diriger ses acteurs ou ses frasques visuelles (même si la plupart sont originales et le plus souvent importantes à l'œuvre) mais bel et bien et avant tout l'histoire, le sujet du film. Ici, ce biopic officieux sur le réalisateur John Huston est vraiment captivant. Eastwood revêt donc une fois de plus la casquette d'acteur/réalisateur et cette fois-ci, ça fonctionne vraiment à merveille...
Le scénario est prenant, les acteurs tous judicieusement sélectionnés pour ne pas rentrer dans l'exhibitionnisme de stars, au jeu juste et sans fioriture. Les décors naturels sont quant à eux très bien exposés, idem pour la reconstitution des années 50. On est donc happé par cette histoire de réalisateur anticonformiste grossier mais au bon fond servie par un Clint Eastwood brillant, mettant son habituel franc-parler et ses coups de poings au service de séquences qui en valent la peine ; en témoigne la scène dans le restaurant, absolument jubilatoire, commençant par la critique nuancée mais néanmoins acerbe et directe d'une antisémite à une empoignade violente contre un maitre d'hôtel raciste.
Le passage, montrant le fond d'un homme au grand cœur, est un paradoxe total avec la nature belliqueuse de ce même homme qui, par la suite, n'aura de raison de vivre que son obsession pour la mort d'un animal, crime purement gratuit mais qu'il juge personnellement jouissif. La suite du long-métrage réserve son lot d'émotions mais aussi de longueurs justifiées, ces moments transposant le ressentiment d'une équipe de film qui attend inlassablement le début d'un tournage éternellement repoussé. Chasseur blanc cœur noir est au final un excellent biopic, à la fois poétique et critique, qui remet en question le talent d'un Clint Eastwood alors au plus bas à la fin des années 80.