J'ai naturellement du mal avec les molles explorations de la noblesse d'où il faut retirer (ou bien d'où il faut que le film lui-même retire) une épaisse couche de faux semblants afin d'accéder aux sentiments collectifs et réfrénés qui - ô surprise qui n'en est pas du tout une - étaient là depuis le début. Or le travail de Frears, plus qu'à en révéler le potentiel par l'image, a consisté à épaissir encore cinématographiquement ce voile invisible.


Faisant rimer mondanité avec ennui de manière effrontément assumée, le film surcharge son histoire de fausses pistes dans l'espoir d'augmenter l'impact d'une conclusion voulue déchirante, mais qui n'en est pas moins le point final à une alignée monocorde d'actes de bassesse attendus chez les hautes classes. Les sourires de politesse de Pfeiffer et les émotions multiples et contenues qu'elle provoque chez autrui auraient pu être le pinacle microexpressif et psychologique d'une jolie étude si un soin plus en douceur y avait été apporté ; mais ils traduisent plutôt l'incapacité de l'intellect bourgeois à l'autocritique, et la fausse douleur circulaire que cela lui cause de ne savoir se contempler lui-même.


Peut-être ce cercle se révèle-t-il mieux spiralé dans le roman ; en l'état cependant, Chéri ne s'élève pas au-dessus de son statut de modeste tentative francophile de voyager dans la littérature.


Quantième Art

EowynCwper
3
Écrit par

Créée

le 9 juin 2021

Critique lue 148 fois

Eowyn Cwper

Écrit par

Critique lue 148 fois

D'autres avis sur Chéri

Chéri
Plume231
6

Colette, ambassadrice malgré elle de l'Entente cordiale !!!

Reconstitution proprette, soignée pour cette adaptation de deux romans de Colette, que je n'ai pas encore lus, sous l'égide d'une touche d'ironie bien britannique bien que l'action se déroule dans le...

le 22 nov. 2013

7 j'aime

2

Chéri
Hansmaj
8

Critique de Chéri par Hansmaj

Michelle Pfeiffer (Léa de Lonval) et Rupert Friend (Chéri) sont sublimes dans ce conte Belle Époque où l'aristocratie française, qui commence à flancher, et la grande bourgeoisie se pavanent dans les...

le 19 oct. 2012

4 j'aime

3

Chéri
Effy
8

Critique de Chéri par Effy

une esthétique parfaite, un scénario bien ficelé, une histoire d'amour à en perdre la raison... notre réalisateur des Liaisons Dangereuses reprend sa dulcinée Mme de Tourvel pour une nouvelle fois la...

Par

le 24 août 2010

4 j'aime

Du même critique

Ne coupez pas !
EowynCwper
10

Du pur génie, un cours de cinéma drôle et magnifique

Quand on m’a contacté pour me proposer de voir le film en avant-première, je suis parti avec de gros préjugés : je ne suis pas un grand fan du cinéma japonais, et encore moins de films d’horreur. En...

le 26 oct. 2018

8 j'aime

La Forêt sombre
EowynCwper
3

Critique de La Forêt sombre par Eowyn Cwper

(Pour un maximum d'éléments de contexte, voyez ma critique du premier tome.) Liu Cixin signe une ouverture qui a du mal à renouer avec son style, ce qui est le premier signe avant-coureur d'une...

le 16 juil. 2018

8 j'aime

1

Mélancolie ouvrière
EowynCwper
3

Le non-échec quand il est marqué du sceau de la télé

Si vous entendez dire qu'il y a Cluzet dans ce téléfilm, c'est vrai, mais attention, fiez-vous plutôt à l'affiche car son rôle n'est pas grand. L'œuvre est aussi modeste que son sujet ; Ledoyen porte...

le 25 août 2018

7 j'aime

3