Rencontre rouge mécanique entre deux maîtres du genre, Christine est un pur produit horrifique des 80's aussi grisant qu'effrayant, les drames viscéraux de l'adolescence dans son rétroviseur. Choisissant de ne jamais montrer l'entité spectrale qui contrôle cette voiture de l'enfer, John Carpenter, maître de la représentation, fait du véhicule hanté le moteur physique du récit, des émotions et ses sensations, l'ultra-violence de sa furie mystérieuse ne se dessinant que dans le rouge variant de sa carrosserie et la lumière hypnotique de ses phares. Du 'Bad to the Bone' de George Thorogood aux touches de synthé paralysantes du réalisateur, le film passe du teenage movie au conte funeste et désabusé, alors que la figure évidente du vampirisme s'impose : cette création ébène de l'Homme devient pur objet maléfique de fascination, glorifié par le cadre, faisant se dépérir par l'amour et l'addiction le jeune protagoniste principal. Cet effet de succion devient vecteur d'un constat amer de déshumanisation dans le passage à l'âge adulte, nourriture d'une infernale et indestructible machinerie américaine qui les dépasse. Ballet rock'n'roll de convoitises et de frustrations qui n'échappe certes pas aux clichés, Christine est une œuvre de commande pas si mineure qu'elle en a l'air, John Carpenter y étouffant l'horreur pure dans une ambiguïté sexuelle aussi caustique que romantique.
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