Santa Claus vs consumérisme
Second long-métrage écrit par Lewis Jackson, Christmas evil est aussi le seul qu'il ait réalisé avant de disparaître de l'industrie du cinéma. Resté inaperçu à sa sortie, ce film est pourtant le premier à se consacrer entièrement à l'histoire d'un père Noël tueur, quelques années après que Histoires d'outre-tombe en ait présenté un mais uniquement dans un sketch, et quatre ans avant que Douce nuit, sanglante nuit, bien mieux distribué, fasse scandale. C'est d'ailleurs grâce à ce dernier que Christmas evil a pu par la suite se faire remarquer, John Waters l'ayant même depuis qualifié de "meilleur film de Noël qu'il existe".
Au lieu de détourner la figure du père Noël, Christmas evil l'évoque par le biais d'un personnage à la bonhomie caractéristique de ce barbu emblématique, représenté très fidèlement, trop même pour ne pas rire à la simple présence chez le héros de carnets où sont notés les bons et mauvais enfants. Cet homme qui joue à se faire une barbe blanche avec sa mousse à raser indique que le film prend la voie de la comédie, ce qui n'empêche que la vision idéalisée de Santa Claus que l'on donne aux bambins ne prenne vie à l'écran, même si elle est chargée de naïveté.
Si le réalisateur se prête au jeu, cela sert à briser d'autant plus fortement l'image de St-Nicolas, d'abord par une reprise de l'idée de la chanson "I saw mommy kissing Santa" qui va plus loin que le simple baiser, puis par une critique de la société où le matérialisme et l'attrait du gain des commerçants l'emportent sur le rêve des enfants.
Cette inclusion d'un message dans l'intrigue retarde l'arrivée des meurtres mais donne à voir avec pertinence une facette de notre monde et rajoute de l'ironie à la transformation d'Harry en père Fouettard, comme devenu fou en découvrant le fossé qui ne pourra jamais être comblé entre la magie de Noël auquel il tient tant et la triste vérité que l'on découvre une fois perdue l'innocence de nos jeunes années.
Harry tente de rétablir la situation tel un Robin des bois, volant des jouets pour les offrir aux enfants pauvres. A le voir danser plus tard lors de sa tournée, nous croirions voir une comédie familiale de période de fêtes, à l'exception près d'un léger air menaçant de temps à autre sur le visage du bienfaiteur, s'il ne se mettait pas finalement à tuer.
Christmas evil est un film qui tient à peine la promesse de son titre, et qui détient une fin qui décontenance la plupart des spectateurs bien qu'elle aille au bout de ses idées. Pourtant il bénéficie dans toute sa durée d'un montage bien pensé ; et malgré un mauvais équilibres de ses différentes parties, cette réalisation de Lewis Jackson est agréable à voir pour des raisons différentes de celle pour laquelle il aurait attiré en premier lieu, c'est à dire sa place parmi les slashers, catégorisation qui sert finalement en grande partie à retirer de la niaiserie des scènes trop pleines de bons sentiments.