Pour qui ne connaît pas Téhéran, le très long premier plan fixe du film de Ali Asgari et de Alireza Khatami peut surprendre. La ville, vue du haut de ses collines, a effectivement une allure assez voisine des métropoles occidentales et on pourrait y ajouter d'ailleurs ses inextricables embouteillages. Les 9 plans fixes qui suivent, comme autant de courtes nouvelles, montrent le quotidien de citoyens aux prises avec le système des mollahs, face à des interlocuteurs (invisibles) qui font appliquer la loi et les consignes religieuses, sans sourciller. Bienvenue en Humilistan, dans un pays où l'absurdité, la rigidité et l'inhumanité rythment la vie des iraniens. Le dispositif du long-métrage, lui-même, est volontairement répétitif, marqué du sceau de l'intangibilité de règles qui renvoient à celles du fonctionnement de l’État et de ses administrations. Évidemment, le film peut sembler peu dynamique mais les dialogues sont vifs et rappellent que l'esprit et l'ironie persans n'ont pas disparu malgré les contraintes et les injonctions liberticides des autorités. Tel quel, Chroniques de Téhéran, à l'image de Taxi Téhéran, adresse un réquisitoire implacable, avec un calme olympien, contre une dictature qui finira bien un jour par mordre la poussière, vaincue par un peuple qui ne renonce pas à la lutte, fût-ce par les biais de l'humour et de la persistance.