Pravda

Avec ce film je comprends vraiment pourquoi Godard adore Vertov, pas que ce film soit mon préféré de lui, mais disons que là il va faire un truc que Godard adore : filmer l'ouvrier au travail, aller filmer dans la rue, aller filmer dans les entreprises, voir comment sont les gens. Parce que le carton au début du film se targue d'être le premier film sans script, sans acteur et qui va tourner directement dans la rue. Du coup tout est dit, il ne ne reste plus qu'à regarder pendant une petite heure vingt la vie en URSS, qui ne semble pas si différente de la vie chez nous.

Sauf qu'évidement c'est Vertov qui réalise, et malgré un aspect sans doute un peu orienté et documentaire, c'est un film expérimental, on voit des plongeons qui n'ont pas grand chose à envier à ceux de Leni Riefenstahl dans les Dieux du Stade qui sont filmés sous tous les angles et passés au ralenti et à l'envers... Idem on verra les sacs de farine tomber dans les bras des meuniers... En fait Vertov s'amuse avec le monde du dehors, il le fait vivre, il nous montre son quotidien, ce qu'il ressent... Il y a quelques moments qui sont assez forts, parce exemple lorsqu'il film le sommeil éternel et qu'il montre la famille qui regarde le corps inanimé et on voit une fille qui fait un regard caméra, c'est juste sublime.

Cependant le défaut du film c'est que ça reste un peu trop désincarné, j'ai largement préféré un Berlin Symphonie d'une grande ville par exemple... ça manque d'émotions, malgré comme je l'ai dit quelques petites scènes où ça fonctionne pas mal. On passe trop vite sur les visages pour que l'on puisse ressentir quelque chose et c'est vraiment dommage, parce que j'ai envie de m'intéresser à ces paysans qui coupent le blé, aux meuniers, aux clochards, aux cocaïnomanes... qu'il nous présente.

On est reste un peu trop dans l'exercice de style et dans l'expérimentation pour réellement développer un truc qui serait fondamentalement touchant. Dommage.