Galérien chez Roger Corman et scénariste sur des productions modestes comme The Trip, Jack Nicholson allait enfin accéder à la notoriété à la fin des années 60 par le biais du mythique Easy Rider, puis grâce à son rôle dans Five Easy Pieces, sa seconde collaboration avec le cinéaste Bob Rafelson.
L'occasion pour l'acteur / scénariste de briller de mille feux dans son premier véritable grand rôle, zonard coincé entre une petite amie bête à manger du foin, un avenir peu radieux au coeur de l'Amérique profonde et un passé familial avec lequel il devra se réconcilier s'il veut pouvoir avancer. La future star de Chinatown laisse déjà entrevoir un sacré talent qui ne demandait qu'à sortir, jonglant sans cesse entre rage contenue, émotion à fleur de peau et folie furieuse.
Portrait de toute une génération ayant désormais perdue une grande partie de ses belles illusions, ne sachant clairement plus où aller, Five Easy Pieces n'est pas toujours facile à aborder, l'intrigue tournant principalement autour d'un enchaînement de séquences au naturalisme à double tranchant, apportant aussi bien une authenticité à l'ensemble qu'un rythme extrêmement casse-gueule.
Pierre importante de cet immense édifice que fut le Nouvel Hollywood, Five Easy Pieces reste ainsi intéressant à voir pour sa contribution à un certain cinéma américain, témoin d'une époque où le milieu indépendant cher à John Cassavetes avait réussi à gangréner le monde des gros studios, donnant naissance à de multiples oeuvres bonnes ou mauvaises, mais qui avaient le mérite d'interroger le spectateur tout en étant un bon retour sur investissement. En ces temps de productions titanesques et formatées obligées de cartonner à tout prix, cela fait doucement sourire.