"Et vous, quel genre d'Américain vous êtes ?"
Dans une Amérique fracturée depuis de nombreux mois par la guerre civile, une petite équipe de journalistes-photographes veut à tout prix (quitte à mettre leur propre vie en danger) rejoindre Washington pour obtenir une interview et une photo du président des États-Unis.
Faisant partie de mes grosses attentes ciné de l'année, ce 4e long-métrage du réalisateur-scénariste britannique Alex Garland (Ex Machina), plus gros budget pour une production A24, n'est pas tout à fait le film auquel je pouvais m'attendre...et c'est ce qui, justement, en fait sa force principale.
Quelque part entre le road-movie et l’œuvre dystopique (qui rappelle notamment les images sidérantes et bien réelles du Capitole envahi en janvier 2021 par les supporters les plus fanatiques de Donald Trump), ce «Civil War» est avant tout un hommage pour le moins immersif au métier de reporter de guerre, un peu dans la lignée d’œuvres comme «L'Année de tous les dangers», «La Déchirure» ou encore «Salvador».
Évoluant dans cette Amérique touchée de plein fouet par une seconde Guerre de Sécession, où l'Armée de l'Ouest (composée des états du Texas et de la Californie) tente de renverser le gouvernement en place, et où affrontements armés et exécutions sont devenus monnaie courante, ces reporters sont là pour être témoins de ce conflit interne qui se déroule devant leurs yeux et leur objectif, s'interdisant d'intervenir dans ce qui est en train de se passer, mais saisissant l'action en direct, et parfois la mort qui en découle, pour que celle-ci se fige, imprime la rétine et dure dans le temps, comme une sorte de message d'avertissement, un rappel pour les conflits à venir.
À la fois spectateurs et transmetteurs de cette réalité brutale et sans filtre, cela ne les empêchent pas de devenir des cibles potentielles sur le terrain, de nombreux dangers se dressant sur leur route lors de leur périple le long de la côte Est. Et risquer ainsi de passer de l'autre côté de l'objectif.
Malgré quelques effets de style faisant irruption par-ci par-là et ne collant pas forcément avec l'esprit du reste du film, voilà une œuvre efficace et impactante de par ce qu'elle nous donne à voir et à vivre, à l'image de cette séquence toute en tension avec des miliciens extrémistes, et bien sûr de cette dernière demi-heure tonitruante se déroulant dans les rues de la capitale américaine, pouvant rappeler l'intensité du combat final des «Fils de l'Homme».
Un film dont la fin pourra sembler abrupte pour certains, mais fait pourtant sens par rapport à ce que celui-ci nous a raconté et montré.
Une image finale et déterminante, imprimée sur pellicule, immortalisant ainsi ce que personne d'autre n'aura eu l'occasion d'immortaliser.
«Civil War» n'est pas un simple film de guerre comme pourrait le suggérer sa bande-annonce et ses affiches, mais surtout et avant tout un film sur les images de guerre, témoins primordiaux de tout conflit et gravant l'Histoire dans les mémoires.