Civil War
6.9
Civil War

Film de Alex Garland (2024)

La résistance s'organise

Règle N°20: Ne pas toujours se fier à une bande annonce. Si comme moi après avoir visionné la bande-annonce deux-trois fois vous pensiez trouver dans ce film un ersatz putassier d'action movie convenu dans la lignée de ces dix dernières années, réjouissez-vous: Alex Garland, l'auteur de La Plage devenu cinéaste, livre ici le premier blockbuster traitant d'un destin possible des États-Unis d’Amérique que bon nombre d'entre nous cauchemardent.

Garland n'est pas le premier, d'autres écrivains s'y sont essayés comme Dan Simmons ou le récent Douglas Kennedy, mais avec l'ampleur d'une production hollywoodienne, jamais. Et que ce soit un anglais qui s'attaque au sujet n'est pas un hasard, le sujet s'étant révélé jusqu'à présent trop gros pour la plupart des cinéastes US, peut-être abasourdis car plongés au cœur du maelstrom.

Dans Une Amérique plongée dans la guerre civile, Lee Smith est une reporter de guerre qui ne vit que pour son métier, comme les collègues qui l'entourent, chacun à leur façon et selon leur génération. Sur le terrain d'une émeute de l'eau aux images si contemporaines qu'elles semblent issues du JT de la veille, elle sauve la vie d'une journaliste novice. Cette dernière va s'embarquer avec leur petit groupe pour Washington DC dans but d’interviewer le président US, aperçu dans la première scène en train de préparer son discours au relents trumpiens.

Qu'elon Musk se rassure, chacun demeure libre de son opinion, d'ailleurs cette allusion n'est qu'un élément contextuel qui se fond rapidement dans un road-movie à la résolution plutôt imprévisible _ un élément rafraichissant et à saluer pour une production de ce type _ ,au cours duquel nous sont présentés efficacement les ressorts du métier de reporter et la violence de ce type de guerre destructrice. Amérique ou non, quoique l'abondance d'armes abonde sûrement au sujet, une démonstration pouvant s'appliquer partout.

Côté mise en scène,si on pourrait reprocher à Garland des afféteries esthétiques néo-pubardes lors de scènes chocs, ces questions de formes _ souvent reprochées à raison à Danny Boyle _ apparaissent dépassées ici par l'ampleur visée du propos, les moyens nécessaires pour l'atteindre prenant appui justement sur les émotions des personnages à l'écran, journalistes en perpétuels rollercoasters émotionnels, qui ne se sentent vivant que sur les théâtres des opérations, scènes mondialement répandues hélas dont il sont membres à part entière (sauf dans les conflits où leur présence est interdite au mépris du droit international...). Ainsi cette bande sonore sélective (notamment Alan Vega) et vectrice-relais du propos, dont certains titres s'élevant dans la continuité d'une scène d'horreur semblent célébrer le simple bonheur d'exister, et où un homme mourant s'émerveillera d'étincelles au cœur des ténèbres.

Même si l'heure est grave, ne nous y trompons pas, quand les hommes se battent en ayant oublié la raison pour laquelle celui d'en face est devenu un ennemi mortel, un journaliste doit faire le job. Pas étonnant que ce film leur plaise.

A noter la ref The Last of Us pour celles et ceux qui voudront la voir, dans la très jeune journaliste aux airs d'Ellie, avec un collègue masculin prénommé Joël. Inspiration et clin d’œil à la dureté d'un contexte post apocalyptique déconseillé aux âmes sensibles, qu'aucun(e) de nous ne souhaite, jamais. Malin sans en faire trop, ni donner dans l''action de jeux vidéo. Ici, on est au cinéma. Dans un blockbuster hollywoodien à l'ancienne, efficace et d'une belle amplitude dans son sujet.

ça n'apporte pas forcément de réponse. Il y a du gras et beaucoup d'armes à feu. Mais, on en avait perdu l'habitude, ça peut aussi faire du bien. Recommandable, mais violent.

Swindgen
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le 19 avr. 2024

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