A part Malcom X, Spike lee s'est surtout distingué au niveau mondial par deux films : Jungle Fever et le culte Do the right thing, qui ( quoi que beaucoup pensent) traitent des relations entre blancs et noirs aux États-Unis . Or , avec ce "Clockers", le natif d'Atlanta plonge au cœur de la communauté noire des ghettos , avec ses passions, ses trahisons, ses contradictions et ... son hypocrisie. Pour y parvenir, Spike Lee s'est inspiré d'un roman policier de Richard Price, et il a élaboré un scénario qu'il serait laborieux de détailler, tant on est surpris par les actions et motivations des personnages, les volte-face et les coups de théâtre de ce thriller social , même si le début du film peut paraitre poussif, et la mise en scène éculée.
C'est le personnage de Harvey Keitel ( dans ses grands jours ) qui paradoxalement nous tient en haleine. Aidé de son adjoint joué par John Turturro, ce commissaire tente par tous les moyens de comprendre ce qui a poussé un " noir" sans grabuges ( Victor Dunham) à commettre un meurtre. il est persuadé que c'est son frère Strike ( trafiquant notoire) qui est le coupable. Donc, voici l'inspecteur parti faire son enquête dans ce milieu qu'il semble mépriser au plus haut point, et voilà aussi qu’apparait le personnage de Rodney Little, Dealer en chef du quartier, cynique jusqu'au bout des ongles, qui vend sa came à tout le monde, noirs et " touristes" blancs confondus. L'inspecteur de police finit par comprendre que c'est lui qui est responsable du meurtre imputé à Victor Dunham. Il n'hésite pas alors à faire pression sur son frère Strike Dunham afin que celui-ci coopère, au risque de le faire passer pour une balance " dans sa communauté". Le peuple crie vengeance, mais qui a le courage d'effectuer une mission aussi dangereuse que tuer Strike? Seul un homme brisé et condamné par la maladie ( qu'on voit au début du film ) semble être prêt à se sacrifier. Mais au moment du passage à l'acte, qui sauvera Strike? Ce sera un adolescent qui le prend pour modèle malgré les avertissements de sa mère et qui abat l'agresseur dans un scène éblouissante . Au final, Le " black " innocent sera relâché, le caïd Rodney mis en prison... reste un problème à régler pour l'inspecteur de police : le fait que l’adolescent se soit procuré une arme pour tuer. Facile, on lui martèle que l'homme qui l'a assassiné était une ordure, qui a déjà fait de la prison pour avoir tué un môme du même âge que lui, et on lui fait dire qu'il était donc en état de légitime-défense, et le tour est joué. les clockers ( ou cloches ) ne sont pas juste les dealers , ce sont les gens de couleur qui s'aiment, se haïssent, s'entretuent, car ils sont tous les maillons d'une même chaîne, qui les emprisonne, le ghetto, où ils sont enfermés, contraints à faire des choix qui les dépassent.
On pourra tout dire, Spike Lee a toujours prôné une plus grande intégration des noirs dans la société américaine, et non pas le communautarisme, et ce film est la plus belle illustration de sa pensée....