Les Frères Wachowski ont décidément bousculé l'univers du 7e Art et ce sur plusieurs formes. D'abord considérés comme de véritables génies de l'industrie cinématographique avec leur impérissable Matrix, habile mélange de science-fiction et de film d'action spectaculaire, ils ont ensuite divisé pas mal de fans avec sa suite et sa conclusion, terminant une trilogie certes sublime mais pas toujours compréhensible. Puis, ils se sont fourvoyés dans l'adaptation visuellement hideuse et très simpliste de l'animé Speed Racer.
Mais le tandem revient en fanfare pour leur sixième film avec un projet aussi démesuré qu'original qui risque fort de faire une nouvelle fois trembler le cinéma... En adaptant le roman culte "Cartographie des Nuages", ils s'associent au réalisateur allemand Tom Tykwer (le fabuleux Parfum), s'entourent d'un casting de choc et d'un budget forcément gargantuesque et nous livrent une adaptation époustouflante sous toutes ses formes.
Six histoires se déroulant sur six lieux et époques différents (la fin du XIXe siècle, les années 30, les années 70, de nos jours, un lointain futur et un autre encore plus éloigné). Une foule de personnages tous plus différents les uns que les autres, incarnés par la même galerie d'acteurs, grimés de façon à chaque fois plus surprenante grâce à des maquillages réussis (voir Halle Berry à la peau nacre ou encore Ben Whishaw en femme, c'est osé mais ça ne tombe jamais dans le ridicule).
Un univers visuel vaste et varié, des îles néo-zélandaises aux forêts hawaïennes en passant par l'Angleterre d'avant-guerre et le Séoul du XXIIe siècle. Les éléments mis en place progressivement, le spectateur ne peut que se laisser porter par cet enchaînement de séquences aux allures chaotiques, monté dans le désordre tout en respectant à chaque fois un certain ordre chronologique explicatif. Le génie vient donc non seulement de la "simple" mise en scène du long-métrage (trois histoires réalisées par les Wachowski, trois autres par Tykwer), mais également de la complexité narrative proposée à l'écran.
Car toutes ces histoires, tous ces personnages extravagants, tous ces mondes distincts se rejoignent, se succèdent et forment un tout logique, cohérent et au final étourdissant. Melting-pot d'influences, d'audaces et d'idées, Cloud Atlas réussit l'exploit de délivrer aux cinéphiles un véritable monument, un classique instantané, un chef-d’œuvre bouleversant qui, à l'image de son histoire, traversera les âges avec grâce.