"- Quoique vous fassiez, ce ne sera jamais qu'une minuscule petite goutte d'eau dans l'immensité de l'océan.
- Un océan n'est rien d'autre qu'une multitude de gouttes."
Les frères Wachowski sont décidemment de sacrés larrons.
Portés au triomphe par la saga Matrix, les deux réalisateurs n'ont, par la suite, pas beaucoup fait parler d'eux durant la dernière décennie. Excepté la notable production de "V pour Vendetta", ils se sont largement éclipsés des ovations du public. Donc, après "Speed Racer" en 2008 et son intrigue d'une banalité astronomique (ne parlons pas de son effroyable mauvais goût...), les créateurs de Néo reviennent à la science-fiction pessimiste pure et dure.
Encore que Cloud Atlas n'est pas uniquement un film de SF, mais un croisement d'intrigues réparties sur six époques différentes, étroitement liées entre elles. Seulement voilà, ces mêmes liens sont au prime abord loin d'être évidents, et recèlent une parabole humaine des plus crédibles et fascinante.
Le long-métrage est une fresque temporelle diablement ambitieuse, de surcroît un mélange audacieux de nombreux genres cinématographiques: de l'historique, du post-apocalyptique, du futuriste, du politique et même de l'humour.
Passé, présent et futur ne sont que des notes sur l'envoutante partition du "Cloud Atlas", l'éternelle mélodie des siècles. Le film souligne l'inéluctabilité de l'héritage, la cruelle loi de la nature stipulant la survie du plus fort au détriment du faible. Mais également la raison; la raison, la vertu et l'altruisme que le temps finira par favoriser. Tous les personnages clés, au destin hors normes dans leurs époques respectives, sont mystérieusement connectés par des éléments matériels et psychiques (sentiments de déjà-vu, marques de naissance, rêves…).
Le tout servi par un casting de choix: Tom Hanks, Hallie Berry, Jim Broadbent… et bien sûr l'indécrottable méchant Hugo Weaving (souvenez-vous que l'agent Smith est immortel).
Pour marquer la synergies entre les siècles, c'est exactement la même équipe d'acteurs qui joue des rôles successifs à travers les époques. Et ces mêmes interprètes sont parfois si bien dissimulés qu'on ne les reconnaîtraient pas; sachant qu'ils ne se tiennent pas toujours du même côté sur la balance du bien et du mal.
Pour conclure,
Cloud Atlas est une expérience très originale et, oserai-je dire, un cinéma expérimental méthodiquement conçu. D'ailleurs, la succession des scènes a du ressembler à un labyrinthe au montage, vu la complexité des intrigues enchevêtrées. Typiquement le genre de film qu'il faut voir deux fois pour en comprendre toutes les ramifications, malgré ses presque trois heures largement justifiées.
Nous verrons bien si leur nouvelle œuvre de Space Opera "Jupiter's Ascending" attendue dans les salles en juillet, arrivera au niveau de Cloud Atlas. Ce dernier étant, à n'en pas douter, une petite perle.