C'est peu dire que je ne m'y attendais pas, mais je ressors complètement fasciné par College Attitude, jusqu'à son titre vf faisant contresens (Never Been Kissed en vo). Entre la rom-com faussement niaise hyper nocive et le film méta sur les teen movies passionnant et cinglant, mon coeur balance. D'autant plus que Raja Gosnell, le réalisateur, n'a réalisé que des merdes à part ce film. Mais bordel, c'est quand même un film dans lequel quand Josie révèle qu'elle n'a en fait pas 17 ans mais 25, le prof qui est la cible de la rom-com lui balance :


"Now I can't look at you like I did before" (un truc comme ça), en prenant un air triste et en la repoussant (comme dans toute rom-com au moment où le personnage révèle sa vraie identité qu'il a caché pour séduire).


Si c'est conscient c'est la réplique la plus culottée que j'ai jamais vu. Le film met d'ailleurs sans cesse en avant des réflexions d'adultes sur le désir qu'ils éprouvent envers des lycéennes.


Alors, est-ce un film victime du genre du teen movie ou le sexe est un code à part entière, ou au contraire foncièrement accusateur ? Eh bien je penche pour la 2e option, déjà parce qu'il me semble que le romantisme à l'eau de rose est clairement valorisé dans le film, d'où le côté rom-com, mixé intelligemment au teen movie, qui favorise ainsi cette critique. Quitte à ce qu'elle soit réac sur tout ce qui porte au sexe et au prince charmant cela dit, mais qui du coup touche au moins juste sur la sexualisation des adolescents au cinéma.


Et c'est là qu'arrive la caméra cachée de Josie, dont je me demandais l'intérêt à part surfer sur The Truman Show : nous sommes dans du cinéma. Avec des attentes, des spectateurs et des clichés qui prennent vie. Avec la fanfare du stade qui joue l'air des Simpson, et en clou du spectacle : Garry Marshall, le réalisateur de Pretty Woman ou encore Just Married, dans le rôle... du chef de la rédaction du journal ! Un homme passionné par "les histoires" que ses journalistes ont à raconter, comme s'il s'agissait de fictions avant d'être des reportages. D'ailleurs, le seul moment où Josie accède à un moment de vérité (une scène bien culcul et sans intérêt pour le coup), c'est celui où elle décide d'arracher enfin la caméra. Bien sûr, les spectateurs (ses collègues de bureau) râlent ensuite, déçu de ne pas pouvoir assister au moment si touchant du bal de promo. Il aurait évidemment été plus fort que nous, les vrais spectateurs, ne puissions pas non plus voir cette scène, mais ce n'est pas réalisé par De Palma donc ne soyons pas trop exigeants. Au passage, le film fait explicitement référence à Carrie et Risky Business, preuve que Raja Gosnell savait un peu ce qu'il faisait. Et devinez le thème du bal : les couples célèbres de "l'Histoire", officiellement en tout cas, sauf que tout le monde se ramène déguisé en personnages de films.


College Attitude traite aussi ce paradoxe bizarre de la mélancolie post-lycée quand on y a subit du harcèlement (j'ai vécu ça et j'ai ressenti ça aussi). Est-ce que si on y retournait, on serait plus cool qu'avant ? Est-ce qu'au contraire on serait dans l'incapacité de changer l'effet qu'on aurait sur les autres ? Le film penche clairement pour la 2e option, puisque Josie se reprend dans la gueule la même chose qu'à l'époque, et n'atteint la popularité dans le dernier tiers que grâce à son frère, populaire lui "de nature". Le film va donc à l'encontre du code du teen movie selon lequel on peut accéder à la popularité si on se compromet psychologiquement et socialement, comme par exemple Jawbreakers sorti la même année ou même Mean Girls sorti lui 5 ans après.


Bien plus qu'un simple ressort comique à la Freaky Friday, le "retour dans le passé" dans Never Been Kissed interroge ces questionnements grâce aux nombreux flashbacks mis en parallèles du présent, qui vont jusqu'à réellement agir sur l'état d'esprit de Josie. D'ailleurs, le film joue aussi sur le paradoxe du désir et son souvenir qui est une question un peu plus complexe et ambigüe : quand le désir réel vers une personne se mêle au désir du passé envers cette même personne (ou ici, son équivalent physique et psychologique - ou presque) basé sur les souvenirs, que faire lorsque l'ancien désir, pourtant légitime à l'époque, devient alors interdit lorsqu'il se situe au présent ?


Bref, le film semble beaucoup plus riche qu'il n'y paraît, malgré des défauts évidents que la plupart auront bien vite fait de souligner. On peut citer par exemple cette romance creepy qui trouve une possibilité d'être grâce à la révélation de la majorité de Josie, mais j'y vois surtout un code du genre à respecter. Ou encore la scène d'explosion des quatre vérités, cliché répété ici sans réflexion. Dernier exemple, particulièrement agaçant : le stéréotype des anciens impopulaires qui ont des super boulots (Josie) et des anciens populaires qui ont un taff de merde (son frère).


Néanmoins, comme avec la plupart des teen movies, il faut souvent gratter sous la surface pour voir avec quelle intelligence (ou non) les films reprennent les codes et les détournent, les critiquent ou parfois y plongent la tête la première. L'horizon de College Attitude est assez ambigu, mais finalement relativement passionnant. En tout cas, le personnage de Leelee Sobieski défonce tout sur son passage, meilleur personnage féminin de geek solitaire ever.

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le 19 juil. 2018

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Antofisherb

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