Et bien deuxième film que je vois de Seth Holt et deuxième claque en pleine figure que je me prends. En fait, l'effet de ce film est équivalent à se prendre un coup de poisson panné laissé au soleil pendant 2 jours : ça marque les esprits!
J'ai toujours peur des films dont le scénario dépend d'une révélation. Comme dans Don't look now ou encore Rosemary's baby. Ces films, je ne les aime pas parce que tout repose sur la surprise et une ambiance glauque (qui consiste à filmer de façon crade). Autant le premier visionnage peut passer, autant le second m'ennuie fortement tant ces films sont creux. The nanny, comme Taste of Fear (hurler de peur), vont bien au delà de l'effet de surprise. Heureusement me direz vous, car la révélation finale est prévisible à partir de la 20ème minute pour les deux films. Non, ce qui est saisissant, ce sont les situations : femme en chaise roulante pour Taste of Fear et relation ambigüe et pleine de tension entre ce jeune garçon et sa nounou pour The Nanny. A partir d'un certain moment, on s'en fiche carrément de savoir qui des deux a tué la petite soeur, ce qui importe c'est la façon dont l'un et l'autre se font des sales coups, la façon dont les personnages se haïssent au point d'occulter tout le monde extérieur.
Ce n'est pas tout! Les scénaristes parviennent à vraiment construire des scènes fortes tirant parti avec peu d'effet. Le plan de la salle de bain avec le point de vue de la nounou est saisissant. De même, la scène de confession est perturbante. Si ça marque, c'est grâce à la mise en scène géniale de Seth Holt qui transcende véritablement l'histoire. Cette scène de confession, donc, marque parce que malgré une tension palpable, Seth décide de la filmer calmement comme s'il s'agissait d'une scène posée. L'effet est saisissant. J'en reviens à cette histoire de point de vue où le metteur en scène prend tout son temps pour montrer ce que tout le monde sait. Il n'en fait pas des caisses, il n'essaie aps d'ajouter du suspens volontairement, il se contente juste de montrer à quelle point la vieille femme ne se doute de rien. Le résultat est sans pareil.
Ajoutez à cela une petite troupe d'acteurs épatants : Bette Davis est troublante dans ce rôle ; le gosse joue bien, et ça c'est suffisamment rare pour le faire remarquer ; et puis tous les autres seconds rôles jouent avec une grande intensité ; il n'y a pas à dire, Seth Holt sait diriger ses acteurs et en tirer le meilleur.
Si je devais reprocher une chose au film, c'est son essouflement sur la scène finale dans la salle de bain, à cause d'une montée trop vertigineuse de la tension. Ca casse un peu le ton donné jusque là, comme un effet abracadabran tout d'un coup moins crédible. C'est regrettable mais cette fausse note ne fout pas tout le film en l'air fort heureusement.
Bref, Christopher Lee avait raison de proclamer Seth Holt meilleur réalisateur de la hammer ; The nanny (confession à un cadavre), est un film qui fonctionne grâce à une construction méticuleuse des interactions entre les personnages ; la mise en scène y est impeccablement soignée et intelligente : il s'agit là d'un grand film digne des meilleurs Hitchcock.