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L’héroïsme. Cette notion qui fabrique des symboles et des modèles qui nous guident à travers leurs actes et leurs gestes. Les héros ont parfois marqué l’histoire, et parfois ce sont des héros du quotidien qui œuvrent dans l’ombre et la méconnaissance générale. Alors que l’on s’acharne à nous alarmer sur le monde qui nous entoure, que les nouvelles déplaisantes ne cessent de faire les unes, nous avons probablement sans doute plus que jamais besoin de héros. Mais ce n’est certainement pas James Mangold et son Copland qui vont embellir un tableau déjà bien sombre.


Martin Scorsese, quelques années auparavant, avait déjà conté les chroniques de gangsters dans Les Affranchis. Cette fois, James Mangold vient s’intéresser au camp adverse, celui de la police, celui de ceux qui défendent la justice et font régner l’ordre. Du moins, c’est ainsi que l’on les imagine. Car dans Copland, c’est tout l’inverse. Comme le titre l’indique, nous sommes envoyés sur la « terre des policiers », là où ce sont bien eux qui font la loi, mais n’hésitent pas à s’en affranchir pour parvenir à leurs fins. Avec un taux de criminalité étonnamment bas, la ville a tout pour être un exemple, alors qu’en réalité, le crime est là où on l’attend le moins, et le quotidien de ces policiers va rapidement nous faire déchanter.


A la manière du Serpico de Sidney Lumet, le personnage principal du film s’avère quelque peu candide, en ballottage entre les différentes parties prenantes, tentant de rester fidèle à lui-même mais condamné à faire des choix aux conséquences considérables. Dans cet univers où les policiers font leur propre loi, règlent leurs comptes eux-mêmes et n’ont de cesse de s’adonner à de viles bassesses et manipulations, nous retrouvons Freddy, campé par Sylvester Stallone. Shérif bedonnant, manquant de confiance en lui à cause d’une surdité partielle qui lui a empêché d’intégrer la police de New York, il est malgré lui la pièce maîtresse du terrible puzzle qui s’assemble devant nos yeux. Antihéros parmi les antihéros, il est le seul à garder une part d’innocence, et c’est de là que provient la lueur d’espoir dans cet obscur paysage.


De par son récit et ses prises de positions, Copland parvient, de manière astucieuse, à créer des oxymores vivants qui soulignent tout le paradoxe d’un monde qui n’a de cesse de s’égarer et de diverger du droit chemin en cherchant à faire le contraire, le tout en alimentant une morale bien pessimiste sur la capacité de l’être humain à être digne de confiance et bienveillant. « L’homme est un loup pour l’homme » disait Sénèque, et c’est ce que James Mangold montre dans Copland. La police, institution défendant la loi, se mue en une mafia impitoyable qui n’hésite pas à tuer dans son propre intérêt. Les policiers sont plus dangereux que les criminels, et pour faire régner leur loi, ils contournent la loi qu’ils représentent. Alors, ceux en qui la population est censée pouvoir faire confiance ne peut le faire, ceux qui doivent lutter contre la corruption sont eux-mêmes corrompus et en dépit d’une volonté de se réguler et d’être contrôlée, la société ne peut annihiler les aspects négatifs et la violence inhérents à la nature humaine. A contrario, le personnage de Freddy vient toutefois apporter une nuance et rééquilibrer la situation pour en montrer des aspects plus positifs.


La nuance est d’ailleurs la clé du personnage et du jeu de Sylvester Stallone, qui tient ici un de ses tous meilleurs rôles. Toujours dans le doute, à la fois rassurant et apeuré, intègre mais influencé, il représente à lui tout seul la pression que peut avoir la société sur un individu malléable et plein de bonnes intentions. Fatalement, si les mauvaises personnes prennent l’ascendant sur lui, il n’aura d’autre choix que de se plier à leur volonté et de les suivre. Copland parvient à transformer cette société en une jungle où les hommes sont relégués à un état sauvage où seule la lutte pour la survie importe. L’héroïsme devient alors une notion plus que jamais abstraite, qui s’assimile finalement à ceux qui parviennent à s’imposer et à survivre le plus longtemps. Au final, le message de Copland est le suivant : policier ou gangster, il n’y a pas de personne foncièrement mauvaise ou foncièrement bonne, notre nature nous incite avant tout à protéger nos intérêts, et un badge de policier ou l’appartenance à un gang n’est qu’une étiquette qui n’a pour vocation que de désigner une place particulière dans la société. Grâce à son casting quatre étoiles, son atmosphère empreinte de paranoïa, et ses choix scénaristiques judicieux, Copland s’impose comme une référence en matière de films policiers.

JKDZ29
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le 4 déc. 2017

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