Après avoir vu un documentaire passionnant et didactique sur ce cuirassé, orgueil de la Kriegsmarine, j'ai eu envie de revoir ce film qui reste parmi l'un des meilleurs films de guerre britanniques, produit sans aucun apport financier américain, mais distribué par la 20th Century Fox.
En mai 1941, le Bismarck fait sa première sortie en Atlantique nord, il coule le Hood, croiseur britannique, et endommage le torpilleur Prince of Wales, si bien que le 22 mai, Churchill dit à la Royal Navy : Pour la survie de l'Angleterre, coulez le Bismarck par tous les moyens. Le cuirassé allemand était en effet le plus puissant de sa catégorie, il fit des ravages dans l'Atlantique nord et représentait une menace pour les convois alliés de ravitaillement, mais sa masse énorme et son armement lourd seront aussi ses faiblesses et le perdront ; dès lors tout fut mis en oeuvre par les Britanniques pour le détruire, et c'est ce qui arriva le 26 mai 1941, soit une douzaine de jours après sa sortie en mer, il fut coulé par un torpilleur après la destruction de son gouvernail.
Ce film restitue de façon claire les conditions de cette victoire, et surtout les préparatifs de l'une des plus célèbres batailles navales de la Seconde guerre mondiale. Lewis Gilbert put consulter les archives de l'Amirauté britannique, il s'est bien documenté sur les conditions réelles du combat qui eut lieu par temps couvert, d'où le fait qu'il réussit à convaincre ses producteurs de tourner le film en noir et blanc afin d'intégrer quelques images d'archives qui renforcent son authenticité. D'autre part, la Royal Navy a prêté son concours en mettant à la disposition de la production 12 de ses navires de guerre pour les scènes de reconstitution de batailles. Le film n'est donc pas statique contrairement à l'idée reçue.
Ce parti-pris a sans doute un peu négligé la psychologie des différents protagonistes et les dimensions politiques du conflit traité, mais c'est volontaire. Le film se réduit donc à une gigantesque partie de bataille navale assez prenante dont on suit les étapes avec intérêt, avec un suspense entretenu, et cette sécheresse quasi documentaire finit d'ailleurs par devenir la qualité principale de cette production, faisant écho au talent des documentaristes anglais qui pendant la guerre filmaient en prenant parfois des risques. Ainsi, ce Bismarck n'a-t-il vécu que quelques jours du mois de mai 1941 non sans avoir causé des pertes aux Alliés, et il repose au fond de l'océan Atlantique depuis presque 80 ans.