Le Scarabée d'or !
Dès son premier long-métrage, Guillermo del Toro montre qu'il est depuis le début un sacré faiseur d'images, un technicien qui maîtrise complètement son outil. De ce côté-là, il n'y a rien à...
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le 17 mars 2021
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On pourrait croire, en voyant la beauté et la matûrité de sa photographie, que Guillermo Del Toro a toujours été le talentueux réalisateur que l'on connaît aujourd'hui; son premier film, Cronos, vient rapidement contrer cet état de pensée, brouillon mal formé qui montre quels thèmes seront évoqués dans la future carrière de l'artiste.
Rétrospectivement, c'est intéressant à voir, tant il montre l'univers particulier, original et sombre de Del Toro (bien avant son Hellboy, succès grand public). On retrouve dès l'introduction son amour pour le conte pour enfant changé en histoire pour adulte, notamment par le biais d'un mélange des genres marqué qui mêle ici le conte fantastique au film de vampire; on aimera ou non, le tout est que l'on se croirait devant une fable cynique traitant avec ironie de la quête d'immortalité d'un vieil homme sans prétention.
Un compte basé sur le Dieu cronos, et qui se déroule petit à petit vers ce retournement de situation sans grand impact où l'on comprend finalement que ce sera un film de vampire, certes bancal, mais tout de même original dans sa manière d'amener la malédiction au spectateur. Seule la manière de se changer en suceur de sang pourra déranger, tant le mode de fonctionnement de l'insecte suceur en or sera plutôt contradictoire avec le mythe du vampire (pourquoi se piquer plusieurs fois; n'est-on pas vampire à vie quand on est contaminé une fois, même si l'on meurt? Meurt-on vraiment, après tout?).
Voyons-y une volonté de changer des codes actuels, volonté trop peu développée et pas assez cohérente pour toute fois que l'on passe sur ses zones d'ombres et de manque d'explications. S'y ajoute donc l'aspect du conte, peu approfondi lui aussi, et qui n'obtient qu'un rôle de justification de l'histoire, là où l'on était en droit de voir, comme avec un Labyrinthe de Pan ou, plus tôt, l'excellent L'échine du diable, un véritable mélange des genres dans l'histoire, crossover des styles qui aurait apporté en lyrisme à l'esthétique globale de l'oeuvre (comme pour les films cités précédemment).
C'est aussi la photographie qui, aussi étrange que cela puisse paraître, y fait défaut : sombre, mal éclairé, Cronos n'est jamais beau, esthétique, visuellement réussi. On peine à voir ce qui se passe de nuit (le comble pour un film de vampires), et les plans marquants se font rares; on essaie donc de se mettre quelques passages sous la dent, sans qu'aucun ne nous marque vraiment; peut-être la première scène de mort, en voiture cette fois, pour le jeu d'un Ron Perlman absolument insupportable et qui démontrait déjà sa propension à bien interpréter les bourrins badass (Hellboy, dites-vous?).
Il est au final le seul à véritablement tirer son épingle du jeu, l'acting global n'étant jamais marquant, même si la présence de Federico Luppi est à noter, figure attachante d'un père de substitution qu'on retrouvera dans les deux films cités plus haut, Le Labyrinthe de Pan et L'échine du diable. C'est aussi par sa présence qu'interviendra l'un des thèmes majeurs de la filmographie de Del Toro, le rapport qu'entretient l'enfant avec l'adulte au sein d'une situation difficile à vivre, souvent sur fond de guerre ou d'arrivée dans leur vie des antagonistes de l'histoire.
Une liaison père/fille intéressante mais amenée n'importe comment, que l'on retiendra moins en tant que point captivant du scénario que comme le brouillon de ce que l'artiste fera plus tard. Elle permettra de développer le personnage de Luppi, de créer des enjeux, mais tombera trop dans le pathos et le mélodrame pour qu'on la retienne, forçant son spectateur à accepter que même les plus grands artistes ont besoin d'une oeuvre fourre-tout pour débuter de modeler ce qui fera la sève de leur carrière, sacrifice au rythme bâtard où l'on retrouve à peine du visuel de son réalisateur, et qui nous affiche des maquillages et effets spéciaux spécifiquement laids.
Attristant quand on connaît la passion qu'entretient Del Toro avec les monstres et leur représentation cinématographique. Il faudra attendre Mimic pour avoir un rythme décent, et L'échine du Diable pour se délecter de son premier grand film. A Blade et Hellboy de prendre le relais pour le faire connaître au grand public international, et lui permettre d'enfin réaliser autre chose que des séries b fauchées, s'armant de ses budgets spectaculaires pour nous pondre certains des blockbusters les plus jouissifs de ces dernières années.
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Créée
le 13 janv. 2019
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