De nouveau attiré par le devant de la caméra après une longue coupure, Clint Eastwood retrouve, trois années après La Mule, le devant de la scène avec Cry Macho, lui permettant de se replonger dans l'univers (certes moderne dans ce cas) du western.
Il y a d'abord une certaine émotion à revoir un Eastwood devenu fragile renfiler un chapeau de cowboy et de voir qu'il n'a pas totalement abandonné le cheval. Road movie plutôt humaniste, Cry Macho permet à Clint de créer une complicité entre son personnage et celui d'un gamin n'ayant pas de repère parental. C'est le cœur du film, et tous les personnages sont directement liés à cette relation. Celle-ci va ainsi passer par plusieurs étapes, plutôt classiques, et vont permettre aussi à Clint de faire un voyage mélancolique, évoquant son passé, la vieillesse ou encore la filiation.
C'est d'abord sur ces points que le film est une réussite. Ballade sur des terres texanes puis surtout mexicaines, Cry Macho retrace un certain héritage spirituel de Clint, ses liens avec le western, son amour pour les coins reculés des États-Unis et pour les gens simples. Ici, il accepte la vieillesse, fait face à son destin et apprend au côté d'un jeune désorienté et prêt à l'écouter. Ces aspects se ressentent aussi dans sa réalisation, il prend son temps, soigne ses cadres, développe la relation, quelques personnages tournant autour ainsi que son amour pour les lieux, mentalités et objets du passé, ceux ayant résisté à l'évolution récente.
Tout cela fonctionne, on prend plaisir à voir un Clint déambulant dans un cadre poussiéreux qu'il retranscrit à merveille. Il n'a plus ses jambes de vingt ans, ni son punch des années Siegel lorsqu'il fout un coup de poing, mais il y a une tendresse particulière, propre à ceux que l'on a vu évoluer, et lui vieillit très bien. Sa prestation n'est pas sans émotion, sans excès de ce côté-là, avec justesse, alors que Cry Macho montre aussi une maîtrise de plusieurs éléments comme la bande-originale (jamais intrusive) ou l'alternance entre de simples moments de vie (les meilleurs moments du film), parfois drôles (et le traitement du coq est génial) et ceux faisant avancer l'intrigue.
Pourtant, Cry Macho montre, et assez vite, certaines limites, à commencer par un aspect caricatural dans les personnages et les relations, en particulier lorsque le duo rencontrera la veuve mexicaine (ou les parents du gamin). Dès que l'on rencontre les personnages, leur sort devient évident, et l'écriture des dialogues n'arrange pas vraiment les choses. De plus, si le film joue avant tout sur l'émotion, et que celle-ci est parfois présente, particulièrement autour de Clint (et de sa mythologie), elle reste discrète dans l'ensemble.
Cry Macho permet à Clint Eastwood de retrouver le devant de la caméra, pour une prestation superbe et une réalisation parfois émouvante, mais n'évitant pas quelques caricatures. Malgré tout, difficile de ne pas voir dans ce road movie poussiéreux et axé sur la transmission, l'image d'un Clint toujours sur la route, regardant le passé avec mélancolie sans oublier de tourner, parfois, le regard vers le futur.