Il y a des films, comme ça, auxquels on s'attache sans raison, d'autant lorsque, avec le recul, nous nous rendons compte de sa médiocrité.
Un tueur au service de la mafia chinoise rempli son contrat lorsqu'il croise une artiste peintre. C'est le coup de foudre, mais, voyez-vous, cette attraction est prise au milieu d'un jeu de quilles entre flics, mafias et les patrons du tueur en question.
Autant dire qu'il y avait de quoi faire avec un peu de matières grises à sa disposition. L'attraction/répulsion entre la plénitude et l'ultra violence, dans un contexte explosif, on a vu des sujets moins glamours.
Hélas, trois fois hélas, Gans n'est pas à la hauteur. Il n'est pas suffisant de connaître les thématiques de ce que l'on traite, mais il est aussi obligatoire de s'impliquer dans le sujet, le prendre et donner cette ampleur, d'exploiter cette richesse à la moindre occasion. Gans transforme, ici, de l'or en plomb.
D'un sujet, donc, au potentiel immense (un film romantique avec un couple pris littéralement entre deux feux), il se contente d'enchaîner les ralentis, les effets de style, les plans iconiques grossiers (le plan de Crying Freeman avec ses sabres à côté d'une statue géante de Bouddha, au secours !) et tout un tas de trucs qui n'apportent rien à l'histoire.
D'ailleurs, Koike, le scénariste du film (également auteur de la bande dessinée), est complètement dépassé par le changement de format, et il est vrai que, lui non plus, ne profite du matériel à sa disposition. Il se contente de coller au manga, dans le plus pur style petit pied.
Ruquier avait bien raison: il s'agit bien "d'un film d'action de plus". Il ne s'agit, pour Gans, que de se conformer aux codes hong kongais, comme si il n'y avait que ça à faire du matériel de base, comme si le manga, pour un connaisseur pourtant revendiqué comme Gans, devait se résumer à de bêtes effets de style.
C'est d'ailleurs l'une des raisons pour laquelle je suis en colère contre Gans, et que je me ferrais un plaisir de le descendre à la moindre occasion: Finalement, il méprise son travail et dessert totalement la cause qu'il est censé défendre.
Maintenant, et ceci expliquera le "recommandé", ça reste un film que je revois toujours avec un certain plaisir coupable, Crying Freeman étant l'une de mes bandes dessinées préférées - éditées à l'époque dans Kameha Magazine - une tuerie ce mensuel !