C’est une rencontre que l’on n’attendait pas mais qui n’étonne pas non plus. Celle du peintre surréaliste, Dali avec le cinéaste Quentin Dupieux. Il ne s’agit évidemment pas ici d’un biopic, et encore heureux, mais d’un vaste délire très bien maitrisé.
Judith est une journaliste qui décroche une interview du peintre pour un magazine. Mais celui-ci n’étant pas filmé, il met fin à l’interview de manière prématurée. Nous suivrons les tentatives d’interviews de Dali, dont l’article se transforme en documentaire. Dans le même temps, un évêque raconte un de ses rêves à Dali qui pourrait être une source d’inspiration pour lui.
Dali est évidemment présenté comme un excentrique, c’est un peu l’idée qu’on s’en fait. Il est incarné par différents acteurs. On y voit surtout les Dali d’Edouard Baer et de Jonathan Cohen, qui collent parfaitement avec l’excentricité de l’artiste, lui ajoutant chacun une folie, qui leur est propre. Ils sont au final chacun auteur de leur Dali. Je regrette cependant de ne pas voir plus ceux de Gilles Lellouche et Pio Marmai (qui, alors lui, ne m’a vraiment laissé aucun souvenir). Cette excentricité va être vecteur du rire. Dali est grandiloquent et se retrouve dans un trip très égotique qui est très drôle, avec par exemple, le fait de vouloir absolument être filmé, la scène de la Rolls sur la plage.
Le film Dali est aussi un film traitant du temps qui passe, de la peur de vieillir et de mourir. C’est assez malin d’ouvrir le film par une reproduction filmée du tableau Fontaine nécrophilique coulant d’un piano à queue. Dans le film, le temps s’écoule ou justement, il ne s’écoule pas. La première scène où l’on voit Dali, il marche dans un couloir en direction de la journaliste. Et pour un couloir pas si grand que ça, la scène dure, dure et dure, où le temps se distord. La notion du temps dans le film se voudrait presque comme une référence aux montres molles du tableau La persistance de la mémoire. Certaines scènes sont aussi tournées dans un sens et sont passées à l’envers. Les timeline de Dali se croisent, entre le vieux Dali et le jeune Dali, occasionnant une peur du vieillissement du peintre. Le film étant très lumineux, je trouve que ces thèmes sont au final dédramatisés, et font du bien.
Le rêve est aussi important dedans. Cette notion est d’abord la traduction des angoisses de la journaliste qui souhaite interviewée Dali. Mais c’est aussi la source d’un running gag sur le rêve du Curé qui n’en finit plus, donnant cet effet d’une histoire racontée par quelqu’un qui ne sait pas raconter. On comprend qu’on est encore dans une version de son rêve lorsqu’intervient un tableau moche, et rend le tout très dôle. Au final, on finit par s’en foutre de savoir ce qui est de l’ordre du rêve ou de la réalité.
De ces éléments, le film est très ressemblant à réalité, mais dans une version plus enjouée et douce, moins anxiogène. C’est aidé aussi grâce à la musique de Thomas Bangalter, une ligne de guitare très entraînante.
Autre point, je trouve que le duo Romain Duris/Anaïs Demoustier fonctionne vraiment bien. Leurs scènes ensemble sont toujours très drôles. Je n’avais jamais vu joué Romain Duris un connard pareil, et on sent qu’il s’est amusé, donc on s’amuse nous aussi.
Enfin, il faut dire que le film est vraiment beau. J’ai trouvé notamment que ce plan de nuit où Dali sort de la maison de son jardinier est vraiment magnifique et m’a marqué.
Le fim ne dure qu’une heure vingt environ, mais à un vrai goût de reviens-y.