Nous sommes dans les années 60, Selma, une jeune mère célibataire immigrée tchécoslovaque aux USA, travaille dans une usine métallurgique. Elle a un fils de 12 ans, Gene, sa raison de vivre. Selma, comme son fils qui ne le sait pas, est atteinte d’une maladie héréditaire qui les condamne à la cécité.
Tel est le contexte de cette comédie musicale réalisée par Lars Von Trier. Alors que les premières comédies musicales de Hollywood se caractérisaient par la légèreté, le réalisateur qui place cette intrigue à une époque où elles sont encore florissantes, a pris le parti de nous livrer un drame. Une bonne option de départ, sauf qu’il en fait vraiment trop ! Et moi qui ai la larme facile en regardant des films, je suis restée de marbre, contrairement à bien d’autres d’après ce que j’ai pu lire sur le site ! Exceptée pour la dernière séquence tout de même bouleversante. C’est le reproche principal que j’ai à faire à ce film : la vie de Selma, déjà marquée par la maladie, s’alourdit par les drames qui s’accumulent les uns après les autres jusqu’à virer à la tragédie la plus noire. Mais c’est tellement énorme que ça finit par ne plus toucher ! Ça en perd toute crédibilité, d’autant que bien des passages de l’intrigue ne sont pas franchement convaincants.
En plus de ce principal frein, je n’ai pas été touchée non plus par le jeu des acteurs, je ne saurais dire pourquoi car ils ne sont pas mauvais, mais je n’ai pas réussi à me laisser rejoindre par eux. Une exception toutefois pour Peter Stormare qui campe un personnage secondaire, le seul que j’aie trouvé crédible.
Et enfin, j’ai été particulièrement gênée par la réalisation. La caméra à l’épaule me donne des maux de cœur et le vertige ! Je n’apprécie pas non plus particulièrement les images décadrées. Donc le film n’était pas agréable à regarder mais c’est l’effet recherché !
Pourtant j’ai apprécié certains aspects du film. Les parties chantées expriment l’imaginaire de Selma, le monde intérieur qu’elle se crée alors qu’elle n’a plus accès à la vision et devient aveugle. C’est la réalité telle qu’elle la rêve et nous y participons avant de replonger dans la dure réalité qui est la sienne.
J’ai trouvé également la place donnée aux sons bien exploitée. Selma qui perd la vision se raccroche à tout ce qu’elle peut entendre et c’est à partir de ces sons captés dans la vie quotidienne – bruits des machines au travail, bruit du train, bruits de pas – qu’elle crée sa vision intérieure onirique de la vie et qu’elle peut respirer !
Le parti pris de prendre le contre-pied de l’atmosphère des comédies musicales légères est aussi intéressant. Selma explique à un moment que lorsqu’elle regarde une comédie musicale, elle quitte le film avant la dernière séquence qui est toujours le sommet des parties chantées et dansées : une explosion de danse, de musique, un déploiement de la chorégraphie mais qui signe aussi la fin du film et elle ne veut pas que ça finisse. Dancer in the Dark se termine également sur une partie chantée et musicale, mais c’est tout l’inverse de ce que Selma a décrit… Les rideaux tombent, et c’est violent !
Au final, je dirais que je ne déconseille pas ce film. Il est tout à fait possible de le recevoir autrement que moi, il n’y a qu’à lire les critiques dithyrambiques sur le site ! C’est très certainement un film intéressant à découvrir. Il est réalisé par Lars von Trier qui fait partie des initiateurs du Dogme95. Il a voulu ici sortir de ces règles qu’il avait lui-même établies et qu’il trouvait dépassées. C’est ainsi qu’on voit une scène de meurtre en désaccord avec la charte du Dogme95. Mais il garde d’autres règles comme le style documentaire grâce à la caméra portée. Naturalisme et symbolisme se mêlent dans cette histoire qui peut certainement toucher bien des spectateurs. Ne vous privez donc pas de vous faire votre propre avis !