Un homme qui travaille dans les carrières va être pris dans un éboulement, et il va en ressortir gravement blessé. Au point que son visage est partiellement couvert d'un masque. Son épouse ne peut ainsi plus éprouver de désir pour lui, et elle va le tromper avec un autre.
A l'instar de Toshiro Mifune ou Charles Laughton qui n'auront réalisé qu'un seul film, Charles Vanel est lui aussi passé derrière la caméra en 1929 pour la seule et unique fois concernant un long-métrage. Qui, jusqu'à sa restauration en 2002 puis 2022, était devenu quasiment invisible, car on pensait que son échec commercial l'avait pour ainsi dire fait disparaitre de la circulation.
Après coup, on ne peut que regretter que Vanel n'ait pu persévérer dans cette voie, car manifestement, il était très doué. Non seulement dans la narration, dans la liberté qu'il a dans les intertitres, qui apparaissent durant le récit et non par des cartons, un peu comme une bulle de bande dessinée, mais surtout, Dans la nuit est un film formidable. Très belle musique signée Louis Sclavis qui n'alourdit pas ce qu'on voit à l'écran.
D'une grande noirceur, il parle du désir d'une femme de voir ailleurs, comme si son désir était en berne en voyant son homme défiguré, avec un masque esthétiquement superbe, et des conséquences de son geste. Il y a aussi des scènes que je trouve magnifiques, comme la fête qui est la première partie, ou le fameux éboulement où les acteurs semblent avoir avalés de la poussière par paquets. C'est d'ailleurs assez court, 80 minutes, mais suffisant pour parler d'un drame et d'un film majuscule, qui a eu comme tort de sortir deux ans après les débuts du parlant, et donc, un muet n'intéressait plus personne. Ce qui fait que les performances de Charles Vanel et Sandra Milowanoff seront tombés dans l'oubli assez rapidement, malgré qu'ils soient bouleversants. Jusqu'à sa résurrection en 2022 ; il faut clairement réparer cette injustice et savourer ce film magnifique, le seul signé Charles Vanel.