Pour les allergiques d'Egoyan, mieux vaut passer son chemin : on retrouve, comme à son habitude, une réalisation des plus sobres dans la forme qui cache une grande complexité dans le fond, ici, l'histoire du charmeur de rats, adapté au récit. On retrouve encore une fois ses thèmes fétiches, tel que la culpabilité, ou encore la famille, ici, décliné en plusieurs foyers. Et encore une fois, Egoyan manque de nous endormir à certains moment, avec l'utilisation de la voix off, également récurrente dans pas mal de ces films, qui pour ma part, n'apporte rien au film à part de plonger ( ou plomber ) encore plus dans l'ambiance contemplative et statique du film.
S'il y a bien quelque choque que je reproche à Egoyan, c'est justement cette immobilité, les humains semblent toujours maîtres de leurs émotions, et pour y trouver un peu de fantaisie... Ce stoïcisme a bien sûr un rôle dans le film, il nous plonge parfois dans un silence des plus désarmements où rien n'est dit, mais où l'on comprend, l'on imagine quasi-surement les ressentis des personnages.
Et pour le coup, je suis plutôt conquise. D'abord pour Ian Holm, excellent en père désarmé, qui veut trouver dans le procès qu'il tente d'intenter, le coupable imaginaire de la décadence de sa fille. Dommage que ce soit, pour moi, le seul qui sort du lot dans ce film, Arsinée Karjhian sort tout de même également son épingle de jeux, avec une justesse qui lui ai propre. ( excellente dans Adoration, bien que je n'ai pas franchement apprécié le film ). La direction global d'acteur n'est pas le point fort du film en tout cas.
Le scénario ( issu à la base d'un livre de Russel Banks ), est par contre, magnifiquement bien ficelé, avec cet écho de l'histoire du charmeur de rat, d'une subtilité que l'on ne saisit qu'au fur et à mesure du film. Le contexte du film est forcément touchante de fait, mais on ne tombe jamais dans du misérabilisme, le questionnement n'est pas autour de la douleur de la perte de quelqu'un, mais plutôt de la recherche d'un coupable, de l'acceptation de la mort.
Le montage est à la hauteur du scénario, subtil, efficace bien que lent, la notion de présent est troublé par le passé, comme pour les personnages qui ont du mal à se détacher du leur.
Une réussite, poignant sans être dans le " pitoyable ", contemplatif et lent pour mieux servir cette confusion du temps...
Enfin un film d'Egoyan que j'aime bien, c'est pour dire !