London Calling
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le 4 mars 2020
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À l’heure où les Biopics hantent le paysage cinématographique international, sort en salles le premier Biopic (au cinéma) du Général de Gaulle, figure historique française. Jusqu’à présent, il n’y avait eu que des téléfilms à son propos.
Il y a quelque chose que j’ai toujours trouvé fascinant dans les mots, c’est la façon dont on peut les interpréter. L’ironie de « De Gaulle » en est l’exemple le plus illustratif. En effet, ce dernier est la figure d’une Histoire où deux France s’opposent : la France qui collabore et celle qui résiste. Il y a deux Gaules. Peut-être qu’en déclarant que toute la France avait été résistante, il voulait lutter contre l’ironie de son nom. Qui sait ?
Plus sérieusement : après avoir vu le film, on se dit que le titre de ce dernier est problématique puisqu’il ne traite pas de « De Gaulle » mais plutôt de l’homme du 18 juin. En effet, les 1h50 du film ne retracent que 2 mois (mai et juin 1940) d’une existence riche en événements. Ainsi, c’est une facette de De Gaulle qui nous est amenée à voir, pas sa vie. Quelque part, c’est tout à fait logique. Lambert Wilson qui interprète le rôle-titre a d’ailleurs déclaré au micro de France Inter « Si on m’avait proposé de jouer De Gaulle pendant toute sa vie, j’aurais sûrement refusé », phrase qui est révélatrice de l’ampleur du personnage, de la maladresse du titre et de l’importance des mots.
De Gaulle montre l’ascension d’un homme, qui va devenir le symbole de la Résistance dans une période où la France s’apprête à collaborer avec Allemagne. On connaît tous l’Histoire, mais l’originalité -qui n’en est pas une en réalité- réside dans le fait que le réalisateur s’attarde sur la relation forte entre Charles et Yvonne. On sait que les scénaristes se sont inspirés des vraies lettres que s’échangeait le couple, mais cela ne fait renforcer que le caractère mielleux du métrage. Le film tente de nous immiscer dans la vie intime du futur premier Président de la Vè République avec notamment une scène d’ouverture qui donne le ton. Yvonne et Charles sont sur leur lit à Colombey-les-Deux-Églises en train de s’échanger de doux baisers.
Le film a un gros défaut, c’est qu’il manque clairement de caractère. En fait, il n’est pas à la hauteur (sans mauvais jeu de mots) de la personnalité du Général De Gaulle. Les personnages manquent d’épaisseur, les interactions entre les différents protagonistes sonnent parfois faux, pas seulement à cause de la théâtralité des tons. Il est difficile pour des acteurs de se transcender quand les rôles qui leur sont offerts sont écrits maladroitement. Heureusement, au fur et à mesure que les minutes défilent, Lambert Wilson semble gagner en assurance dans son jeu jusqu’au climax de son acting lors qu’il appelle à la Résistance. Concernant les seconds rôles, on a beaucoup de mal à y croire (excepté Olivier Gourmet qui joue bien le dépassé Paul Reynaud), et pourtant c’est un biopic qui se veut au plus proche de la réalité. Typiquement, le personnage de Churchill est caricatural, en témoigne sa première intervention en français qui m’a nerveusement fait rire. De ce film résonne ainsi la maladresse.
Les Mémoires de guerre du Général de Gaulle, le témoignage de son fils Philippe et les lettres échangées avec son épouse Yvonne : tant de sources qui donnent au film un souffle de réel. En plus de ça, le réalisateur joue avec nos perceptions, très justement pour certains, trop lourdement pour d’autres. Le nombre de plans où Lambert Wilson est filmé de dos ou de profil est incalculable. On perçoit à quel point Lambert Wilson (dans le rôle qu'il interprète) a le profil et la carrure du Général. Mais dès qu’on s’attarde sur son visage, la réalité nous rattrape. C’est ambigu puisqu’on comprend à travers la réalité que c’est de la fiction, et à travers la fiction que c’est une forme de réalité. Gabriel Le Bomin interroge réellement notre capacité à s’imprégner de la fiction, pour appréhender la réalité. Le problème est que le réalisateur abuse de ces clins d’œil. Au début, on trouve cela intéressant, à mesure que le film avance, la pertinence « recule ».
Finalement, le métrage n’a pas un traitement si original et laisse un goût amer au spectateur.
De Gaulle est l’exemple typique d’un film trop lisse cherchant le consensus pour éviter de dévoiler une radicalité insoupçonnée. Face à ce produit aseptisé, on reste hermétique au film et on se demande pourquoi le Biopic est sur le trône de la création cinématographique.
Peut-être que face à un bon profil, on se voile la face.
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Créée
le 10 mars 2020
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