Le devoir de mémoire, concernant le passé colonialiste de la France, passe aussi par le destin de cet ouvrier (français) condamné à mort pour un "attentat terroriste" (déjoué) à Alger. L'homme, militant communiste, est donc, d'une certaine façon, mort pour la France, ou pour ses intérêts nationaux, si l'on préfère. Un sujet passionnant, maintenant que le silence assourdissant sur les "événements" d'Algérie n'a plus cours, qui aurait mérité un film avec davantage d'étoffe et mieux construit que De nos frères blessés. Avec ses flashbacks innombrables, qui ont pour but de montrer l'histoire d'amour du futur guillotiné et d'introduire ainsi la vision de son épouse dans cet affaire déplorable, le film perd de son acuité et se disperse, alors qu'une suite chronologique simple aurait sans doute permis de mieux cerner les enjeux et, surtout ,de témoigner de manière plus aiguë de la violence de l'époque. De nos frères blessés est à charge contre l’État français, évidemment, et c'est une lecture logique, mais y manque aussi le contrechamp, quant aux motivations du système d'occupation et d'oppression colonialiste pour délivrer un jugement "exemplaire" eu égard aux troubles de cette période. Malgré la qualité des interprétations de Vincent Lacoste (de plus en plus impressionnant) et de Vicky Krieps (toujours juste), le film de Hélier Cisterne déçoit par son incapacité à dépasser la simple illustration scolaire quoique confuse, d'un cas qui représente un exemple symbolique d'une justice inféodée à l'arbitraire de la politique.