Oeuvre hallucinante et hallucinée

Loin des paillettes hollywoodiennes, un portrait naturaliste de cette "conquête de l'ouest" par les colons blancs américains émigrés d'Europe. Une réalisation hallucinante et hallucinée où Blake est en errance entre deux mondes, celui de la froide rationalité moderniste et celui de l'intelligence des équilibres. "Pauvre con de blanc", qui ne cherche pas à être un connard, Blake est le jouet de l'absurdité de ce choc des époques, se laissant porté et emporté par le gré des évènements qui en feront un hors-hors-la-loi, un en-dehors complet sans but ni horizon, ni mort ni vivant, qui tue sans haine, et se défend sans force.

Un chef d'oeuvre absolu, où la musique pulsionnelle parle davantage que les protagonistes. Un des traqueurs chasseurs de prime étant le plus fidèle rejeton de la modernité : cannibale, sociopathe, psychopathe. Police, patron, curé, salarié, tout le prisme du capitalisme sauvage américain naissant est passé au crible dans une réalisation époustouflante.

Les villages sont ce qu'ils sont, la crasse, le silence, l'ennui, la lenteur des scènes et l'aspect cru du décor nous dépeint une quotidienneté du Far west qu'on avait tendance à oublier et noyer dans les cascades de nos fantasmes Disneyens.

Dans ce "nouveau monde" de violence coloniale et économique, nous sommes tous des Dead Man.