La belle et le monstre

On suit les pérégrinations d’un acteur-manipulateur-narcissique-fan d’inceste. Le tableau est dressé pour ce mélange de rapport à l’image malaisé et de comportement perturbé.
Plus que la sensation de malaise face au rapport plus qu’ambigu entre demi-frère et demi-sœur, c’est l’attitude détachée et normalisante du personnage principal. Pour lui, il s’agit d’une perversion comme une autre (tout le monde en a pour lui, est-ce faux ?) et il ne s’en cache pas du tout, et en priorité vis-à-vis de sa demi-sœur. Il n’a, par exemple, aucun mal à lui montrer son dispositif lui permettant de l’espionner. Son désir numéro un est d’entraîner celle-ci dans les méandres de son délire.
Le malaise est accentué par le physique même de sa sœur. Une lolita des temps modernes, à peine majeure, le visage poupon, un corps aux formes généreuses dont elle se détache totalement, ce qui la rend d’autant plus « involontairement » sexy.
Bref, on assiste à la perversion d’une supposée candeur et à la chute qui s’en suit. Le rejet des autres par rapport à la situation est assez violent dans tous les sens du terme. Demi-frère et demi-sœur sont unis dans le jugement public.
Au niveau du film en lui-même, j’ai apprécié le choix du réalisateur de filmer un personnage à la fois, rares sont les moments où les acteurs se font face dans le même plan. On voit un acteur, on entend la voix de l’autre. Et ce plan sur la conversation téléphonique où l’on voit le demi-frère à côté de la projection de l’image de la demi-sœur (filmée dans sa chambre à son insu) ! Très bonne idée, malaise garanti.
On est d’autant plus mal à l’aise avec l’intéressé que l’intéressée. Mal à l’aise accentué par la référence ultime à l’un des films les plus dérangeant de l’histoire du cinéma. Le loup est rentré dans la bergerie, il a dévoré l’agneau, l’agneau est devenu une partie du loup.