C’est une comédie à la tonalité foncièrement mélancolique dont le thème n’est autre que la vieillesse et l’attente de la mort et dont le titre original Primo amore est empreint d’une ironie amère que le distributeur français a voulu gommer, annonçant pour ainsi dire franchement la couleur.
En effet c’est un amour bien improbable et fragile qui lie les deux protagonistes du film : le comique de music-hall sur le retour dont, avec un sens aigu de l’auto-dérision, Ugo Tognazzi fait une espèce de clown pathétique, et la femme de chambre incarnée par une Ornella Muti resplendissante de beauté et de jeunesse.
Ornella Muti appartient à un âge non mythique du cinéma italien. Elle tourne son premier film en 1970, date qui symbolise le début du déclin de la production transalpine, après deux décennies de suprématie artistique. Armée d’un érotisme juvénile, d’une grâce insolente et placide, d’une indolence qui pourrait passer pour de la paresse, et d’une beauté époustouflante, elle va inspirer deux grands cinéastes de l’époque, Marco Ferreri et Dino Risi.
La férocité attendue du trait, si elle n’est pas absente, loin s’en faut, s’accompagne pourtant d’une véritable tendresse pour ces personnages tous plus ou moins paumés et le grotesque sans retenue est teinté d’une poésie triste.
Le décor grandiose, filmé à Montecatini Terme, du grand hôtel 1900 qui abrite la maison de retraite dirigée d’une main de fer par un ancien colonel (le célèbre ténor Mario del Monaco) est magnifié par la photo de l’immense Tonino Delli Colli et suscite la nostalgie d’un monde révolu.
Chez Risi, où le désir sexuel (le sien, celui de ses acteurs comme de ses personnages) a toujours été un véritable moteur pour filmer et raconter des histoires, l’érotisme se transforme en délire libidinal, entre impuissance et priapisme de vieillard.
Le rire s’étrangle souvent dans la gorge à la vision de cette comédie dépressive qui refuse néanmoins de céder au mélo et se maintient sur le fil ténu d’une gaîté désabusée.

Chicago
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le 2 avr. 2016

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