Et donc il y a cette scène dans World war Z, tu t’en souviens peut-être, cette scène (la meilleure du film, ou serait-ce celle de l’assaut à Jérusalem ?) où des zombies foutent une panique générale dans un avion jusqu’à le faire s’écraser en beauté, et donc Sang-ho Yeon décide de faire quasi la même chose dans un train en reprenant la même trame (invasion et attaque foudroyantes de zombies ultra agressifs) et le même style de héros (un père qui, ici, tente de protéger et de sauver sa fille du chaos) qui se découvrira fort et valeureux et courageux, mais sans prendre le temps de boire une canette de Pepsi à la fin.


On accuse souvent (à raison) les Américains, dans leurs blockbusters, de verser un peu trop (beaucoup) dans le manichéisme et les bons sentiments, mais ce Dernier train pour Busan s’y complait néanmoins avec autant d’enthousiasme (le pathos n’a pas de frontières). Le film y perd son âme, n’est qu’un copié-collé d’une production hollywoodienne standard (et déjà promis à un remake international : la boucle est bouclée) dont on aurait simplement remplacé les acteurs de seconde zone par des stars coréennes (qu’on remplacera donc par des stars américaines). Le tout en pleine ferveur exponentielle pour le cinéma coréen depuis quelques années et balancé dans un célèbre festival du sud de la France, et hop, le tour est joué.


L’illusion fonctionne à plein régime, l’emballement critique aussi qui, évidemment, y cherche et y voit une charge soi-disant habile (grossière) contre l’ultralibéralisme (c’est parce que toutes les classes sociales sont représentées, tu comprends, y’a un sens politique énorme derrière, et à un moment on dit que les zombies, c’est de la faute d’un méchant consortium chimique, c’est pour ça quoi). Sang-ho Yeon en mode Romero ? Soit. Dernier train pour Busan n’a rien de déméritant en termes d’action et de mise en scène (belle gestion de l’espace avec ces trajectoires à l’horizontal, ce système de wagons à traverser, de portes à ouvrir et à fermer…), mais se plante dans son fond de commerce (rien de nouveau sous la mâchoire mastiquante du zombie) et dans le traitement, très caricatural, de ses personnages.


En particulier celui de l’odieux capitaliste dont on sait qu’il est odieux ET capitaliste parce qu’il porte un costume-cravate, qu’il est gros, qu’il est moche, qu’il pense qu’à sa gueule et qu’il crie presque tout le temps sur les gens. Quant au mélo familial qui sous-tend ce survival ferroviaire, il est d’un cliché à peine rattrapable (et finalement trop sérieux pour prétendre le détourner ou s’en moquer) jusqu’au dénouement sur la locomotive, summum de bouffissure larmoyante qui, semble-t-il, n’a pas gêné grand monde (il fallait y voir du second degré, mec, une farce), mais se retrouverait conspué sans états d’âme chez Michael Bay ou un autre tâcheron obéissant. Comment c’est déjà ? Ah oui, c’est une question de… "feeling".


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le 24 août 2016

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