Des vents contraires par Critique-film
Des vents contraires est le film tiré d'un roman écrit en 2009 d'Olivier Adam (qui a également participé à l'écriture du scénario). Et ce n'est pas le premier de ses livres porté sur grand écran puisque le monsieur en question est déjà l'auteur du très bon – et du très perturbant - « Je vais bien ne t'en fais pas ». Le ton est donné, sortez donc les mouchoirs les pleureuses, puisque l'homme est un habitué des histoires chic et choc, ancrées dans la réalité, et qui parviennent à vous retourner. Des vents contraires n'échappe pas à la règle, sachez-le. Le long métrage se construit comme un livre, que l'on découvre à chaque page ou minute, et qui nous tient en haleine comme un bon polar jusqu'à la toute fin pour avoir la réponse à nos questions. Les personnages y sont détaillés, travaillés, précis, comme le sont les personnages de roman.
Les décors sont aussi de vrais décors de bouquin, que l'on imagine décrit pendant des pages et des pages. Et quoi de mieux qu'une côte bretonne déchaînée en plein hiver pour remettre les idées en place à notre héros? Tourné entre Saint-Malo et le Cap Fréhel, le film nous offre la nature en toute simplicité, et Lespert nous donne envie de nous perdre le long de ces rochers fouettés par le vent et la mer. Et pour une fois que les bretons n'y sont pas représentés comme de vieux pêcheurs aux pulls rayés, on remercie le réalisateur de ne pas avoir sombré dans le cliché...
Mais Des vents contraires, ce n'est pas seulement un petit guide du Routard de la Bretagne. Sous ses airs de polar, avec cette histoire de femme disparue, Jalil Lespert creuse de nombreux thèmes qui se révèlent petit à petit. Au-delà du mélo autour de la vie d'un homme perdu sans sa femme, nous assistons à une réflexion sur la paternité, sur le lien d'un père avec ses enfants, semblable à « Je vais bien ne t'en fais pas ». Jusqu'où les pères sont ils prêts à aller pour leurs enfants, par amour? Encore une fois, on dresse ici le portrait de ces hommes qui ne veulent pas montrer leurs faiblesses, qui ne savent pas exprimer leurs sentiments. Mais nous avons surtout un film sur la famille au sens large, sur les liens qui l'unissent, sur les coups de gueules et les bons moments passés qui la composent et qui causent nos drames comme nos plus beaux souvenirs.
Et cette famille réunit plutôt du beau monde il faut l'avouer. Le film est clairement porté par ses acteurs sans qui le long métrage paraitrait bien fade. Avec Benoit Magimel en personnage central perturbé (qui retrouve Jalil Lespert après 24 Mesures), on retrouve un bon caméo d'Audrey Tautou ou encore un parfait petit rôle de fliquette humaine en la personne d'Isabelle Carré.
Mais l'on doit surtout saluer les performances d'Antoine Duléry en grand frère touchant et 100% crédible dans sa simplicité, et de Ramzy Bédia qui se voit offrir un rôle profond et tout en retenue qui lui va à merveille. On découvre en effet une nouvelle facette du comique qui se retrouve dans la peau d'un père de famille prêt à tout pour l'amour de son fils. Un rôle secondaire puissant qui je l'espère lui ouvrira les portes du cinéma dramatique.
Au final ce serait presque Magimel qui s'en sort le moins bien. Forçant parfois un peu trop, il en devient à mon goût moins crédible et moins émouvant. Les petits rôles eux ne sont pas pour autant négligés, puisque nous avons les belles apparitions de Marie-Ange Casta (oui, la soeur de Laetitia, hyper ressemblante), ou Bouli Lanners (Les Géants) que l'on retrouve en tant qu'acteur avec plaisir.
Puis surtout, on retient le jeu des enfants, qui arracherait une larme à n'importe qui possédant ne serait-ce qu'un infime bout de coeur. Volant presque la vedette aux adultes, ils font en sorte que le film tienne la route, et montrent une réelle complicité avec le couple Tautou/Magimel ainsi qu'avec Antoine Duléry qui nous offre des moments drôles et pleins de légèreté qui sont appréciables.
La légèreté donc, ce n'est pas vraiment ce qui caractérise Des vents contraires. En gros si vous avez déjà envie de vous jeter sous une rame de métro, évitez d'aller voir ce film... Par contre, ceux qui ont envie d'être ému, de verser leur petite larme, et de s'infliger une histoire bien dramatique comme on les aime, ce sera le film de l'année. Parce que disons-le, le film reste tout de même lent et long, souffrant d'un vrai manque de rythme à certains moments, et d'histoires peu crédibles et non exploitées jusqu'au bout (dont celle avec Marie-Ange Casta).
D'un autre côté, il nous fait passer du rire aux larmes, alternant périodes de solitude du personnage avec des moments de joie complètement dus aux enfants. On rit, on pleure, on ne sait jamais de quoi la scène d'après sera faite, ça part dans tous les sens...bref, le titre du film n'aura jamais été si bien trouvé.
Bilan : Jalil Lespert réussit dans l'ensemble son film qui, malgré quelques longueurs et son côté mélo appuyé, parvient vraiment à nous émouvoir et fait la part belle aux acteurs, des plus jeunes aux plus vieux. Un film touchant, sur la famille, moins puissant que Je vais bien ne t'en fais pas, mais qui risque quand même de vous retourner.
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