En mêlant le film de guerre, le western et le film à intrigue policière, le réalisateur Kihachi Okamoto, auteur de plusieurs chambaras parmi les meilleurs, comme Le Sabre du Mal ou Kill, La Forteresse des Samouraïs, adopte un style satirique en totale rupture avec la manière habituelle des auteurs japonais d’aborder la thématique de la seconde guerre mondiale.
Le héros du film, le sergent Okubo, interprété par Makoto Satô, est en quête de l’assassin de son frère. Pour se faire il déserte l’armée et usurpe sa propre identité en se faisant passer pour un journaliste. Après s’être liée d’amitié avec un groupe de belligérants mandchous (mais où est donc passé l’esprit patriotique… ?), il tente de rejoindre un repaire de soldats nommé « l’avant-poste des brigands »…
Le personnage principal, de par son attitude totalement insouciante et son verbe haut, préfigure les héros westerniens du cinéma italien. La réalisation d’Okamoto emprunte de dérision fait exploser l’aspect sérieux du conflit militaire, allant jusqu’à filmer des fusillades avec un style totalement décalé. Comme s’il cherchait en permanence à ironiser sur l’absurdité de la guerre.
Ici, l’ennemi mandchou, est plutôt montré à son avantage, en résistant déterminé, et c’est du côté de certains officiers nippons que se trouvent les méchants de l’intrigue.
Avec un style vif et un dynamisme de la mise en scène qui frôle souvent l’excès, Okamoto passe d’un style à l’autre alternant le comique de situation et des moments plus graves sans prendre le temps de justifier les actes de ses personnages. D’ailleurs il les fait entrer et sortir du champ à une vitesse spectaculaire. Ce qui fait souvent perdre à son intrigue le soupçon de crédibilité qui aurait pu lui donner une aura plus ample.
A vouloir sans cesse virevolter entre les genres, sans ménagement et avec une sorte de style très/trop insouciant, il oublie parfois d’adopter une ligne désenchantée qui aurait permis à son film de sortir de cette ornière un peu trop rocambolesque qui lui confère des allures de bouffonnerie inoffensive au final.
Visuellement c’est en revanche plutôt réussi et c’est souvent dans ses pires travers, avec ce style ironique parfois forcé, qu’Okamoto parvient à adopter une manière de faire absolument innovante. D’une sorte de gloubiboulga qui mêlerait le western à la Peckinpah, le film de désert à la David Lean et la comédie à la Robert Altman, le réalisateur réussit malgré tout à trouver une sorte d’équilibre assez miraculeux, malgré le bordel stylistique qu’il crée par un manque de tenue généralisée. Difficile à juger en fait.