L'anti-Cercle des poètes disparus

Un peu, mais pas trop quand même, car la finalité est la même : enseigner le goût du savoir, par la lecture et par l'écriture. Pas la même classe, pas le même environnement, ici tout est noir, ou presque, et on en vient à se demander comment ce type névrosé, voire torturé pour être plus exact, fait pour avoir une vie aussi merdique. Mais il se débat. Il essaie d'en sortir, de cette merde, par le raffinement, la transcendance, la quête de l'absolu et de la perfection dans les mots.

C'est bien joli, sur le papier, mais le tout manque de nuances, et aurait gagné à avoir plus de relief, notamment avec une instrumentation mélodramatique moins "omniprésente", pour reprendre un terme du film. Reste que le réalisateur d'American History X sait quand même y faire pour distribuer des petites claques, à assauts réguliers, jusqu'au final, assez extatique et resplendissant... comme une lumière au bout du tunnel. Un happy end ? Pas un spoiler, en tout cas, car il fallait bien que ce type sans attaches trouve définitivement son salut dans la paix intérieure.

Detachment est un bon exemple de ces films qui manipulent : tout est fait pour prendre par les sentiments, pour persuader plutôt que convaincre (j'ressors mes cours de première, attention), et ça marche, quand même, plutôt bien. Cette version survitaminée d'Entre les murs m'a fait me sentir dans mon élément : le genre de film aussi noir que l'intérieur du cul d'un mammouth, où aucun espoir n'est permis, où la litanie du malheur ronronne et tourne et retourne sur elle-même, comme s'il n'y avait que la répétition de jours ternes ; et au creux de la vague, la beauté du martyr. Ca peut agacer, c'est sûr, surtout quand ces séquences de confessions face caméra sont aussi épisodiques, presqu'injustifiées, comme celle de la chambre d'adolescentes où des créations artistiques recouvrent le moindre cm² de celle-ci...

Bref, il n'y a pas à tortiller, Detachment mérite un 7 si on s'y abandonne, mais n'atteint pas le but ultime de faire adhérer à la démarche cinématographique, justement parce qu'il use des mêmes armes qu'American History X pour bousculer son audience.
Adrast
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le 22 févr. 2012

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