Pas une grande leçon de cinéma....

Tony Kaye, réalisateur du brillant "American History X", signe ici un film bien moins percutant.

Sujet : l'éducation et le statut des enseignants dans les zones difficiles. Décor : Un lycée quasi-désaffecté que les parents, les professeurs et les élèves ont déserté.

D'un côté, on y voit des adolescents dépressifs au bord du suicide, des futurs psychopathes (tuer un chat à coups de marteau, c'est angoissant), des décrocheurs, des élèves qui n'ont plus aucun sens du respect et de la dignité.
De l'autre, des professeurs humiliés et découragés qui prennent des cachets pour tenir le coup, un proviseur à la carrière sur le déclin en pleine crise de couple, une psychologue au bord de la crise de nerfs.

Au milieu de tout ce petit monde, Adrien Brody, professeur remplaçant, vit dans l'instabilité : traumatisé par une enfance chaotique marquée par le suicide de sa mère, il refuse de se poser et vit "au jour le jour", sans attaches. L'insolence des élèves ne l'atteint plus. Creux, il fraye son chemin dans ce monde où les illusions ont disparu depuis longtemps.

Si le réalisateur avait pu se contenter de cette simple trame narrative, son film aurait pu gagner en pertinence. Au lieu de ça, Tony Kaye entremêle des histoires toutes plus empreintes de pathos les unes que les autres. Un vieux mourant en soin palliatifs nous donne l'occasion de faire un détour par la gériatrie, tandis qu'une jeune prostituée paumée nous montre une jeunesse en perdition. Recueillie par le personnage d'Adrien Brody, cette dernière noue des rapports très forts avec lui : à quel titre ? En quel honneur cette histoire, certes touchante, vient-elle se greffer sur la trame de base ?
Ajoutons à cela un grand-père incestueux et une élève incomprise délaissée par les siens, et on obtient un mélo hybride où le sujet de départ se noie dans des torrents de messages mielleux qui ne font qu'appauvrir l'histoire.

Beaucoup trop appuyé et lourd, le film perd également en intensité car il n'est pas doté de la finesse et de la subtilité escomptées : Tony Kaye nous assène ses leçons avec de gros sabots, et nous donne envie de nous détacher du propos.

Restent quelques répliques qui interloquent et un Adrien Brody convaincant en homme torturé.
williamblake
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le 24 janv. 2012

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williamblake

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