Il y a quelques temps, je critiquais la volonté des réalisateurs à faire des films trop formatés pour les compétions. Bref des films bons sur le papier et élitistes mais qui se révèlent inintéressants au final. Ce fut le cas de Still Alice qui malgré ses qualités tenait plus du film pour Julianne Moore qu'un film tout court. Mais il y a des films qui te prend au tripe des la réalisation, malgré le terme abordé qui est sur le papier pas extraordinaire. Aux Oscars, c'était Birdman, à Cannes, c'était Dheepan



Jacques Audiard à la barre



Pour ceux qui connaissent pas, Jacques Audiard est pour moi l'un des réalisateurs français les plus talentueux de sa génération. Et ce film le prouve une fois de plus. La réalisation est vraiment impeccable et est vraiment dans son pur style. Une image travaillée, une musique bien employée et une bonne mise en scène. Je savais qu'il pouvait faire de bonnes scènes d'actions (si si ! Il y a des scènes d'actions !) et là il fait de bonnes idées de mise en scène (emprunté ou non de Old Boy) qui font mouches dans les scènes d'actions. Et là vous me dites : pourquoi je vous parle des scènes d'actions ? Et bien tout simplement que ce n'est pas ce qu'il y a d’intéressant en général dans le cinéma de Jacques Audiard. Mais voir à quel point il s'applique sur les scènes d'actions, c'est juste époustouflant. Cela dit, le reste est du pur Audiard : un travail sur le cadre, une manière particulière de filmer le quotidien, une réalisation usant de la mise en scène et de la musique de manière à ce qu'on sent une vraie progression un final qui en met plein là vu et est paradoxalement poétique. Bref la réalisation est toujours classe. En revanche, et ça c'est un défaut de son cinéma, les personnages et l'histoire pêchent un peu. Rien de grave mais quand même.



Qu'est-ce qu'une famille ?



Au niveau des personnages, nous avons le "père" Srivalstan de son vrai nom (joué par Antonythasan Jesuthasan) est un ancien soldat des Tigres Tamoul qui décide de rentrer clandestinement en France sous le nom de Dheepan. Toujours sur le qui vive, il a connu les affres de la guerre et décide de vivre son métier de gardien avec la famille qu'il s'est créer. Progressivement, il finira par s'attacher à elle mais ne sera jamais vraiment intégrer. Il accepte l'idée de famille plus comme un devoir au point que le mensonge est devenu réalité. Malgré ses airs un peu dur, c'est le plus tolérant et conciliant de la "famille" mais protecteur, même lorsque son passé le rattrape. En effet, on sent qu'il ne veut pas perdre le contrôle de sa vie et quand la guerre des gangs arrivera, il va réveiller ses instincts de soldats. Si je l'ai comparé à Rambo, ce n'est pas un hasard il est un personnage à la Rambo des origines : une personne qui a connu les affres de la guerre et qui veut seulement avoir une vie meilleur, quitte ici à vivre dans le mensonge.


Yalini (jouée par Kalieaswari Srinivasan) est la "mère" . Jeune fille qui veut retrouver sa cousine, elle est la plus impétueuse et vie difficilement sa condition de fausse épouse et mère. Mais au fur et à mesure du récit, elle se révélera la plus intégrée. Elle se liera le plus au monde surtout au contact de Brahim et de son travail de aide à tout faire. Cependant, elle cédera à la peur dès que la guerre des gangs arrivera, cherchant même à ignorer son "mari", quitte à tout renier.


Illayaal (jouée par Claudine Vinasithamby) est un personnage pas si exploité que ça. Et c'est dommage. Orpheline, elle est la "fille" qui veut une vraie famille et qui n'arrive pas à s'intégrer à l'école. Etant la seule à s'avoir quelques bride du français, elle était un pan, mais se retrouve vite au second plan dans le récit (on sait seulement qu'elle a changé de classe en passant d'une classe adaptée à une classe normale).


Sinon, 2 personnages qui ont plus ou moins d'importances : Youssouff (Marc Zinga) est celui qui a offert le travail de gardien à Dheepan. Il n'est pas très visible mais il a quand même un petite présence. Cela dit elle s'efface une fois l'arrivé de Brahim (Vincent Rottiers). Il est en l'employeur de Yalini, avec laquelle il nous une relation de confiance et d'amitié. Cela a permis à cette dernière d'évoluée un peu plus dans le film faisant d'elle un personnage sympathique.


Les autres personnages sont anecdotiques. Il y a bien le traducteur qui connait le secret de Dheepan qui apparaît à 2 reprises mais il n'y a pas grands choses à en dire. Si ce n'est qu'il devient le pont entre Dheepan et son passé.


L'histoire ne se concentre que sur la famille, mais on voit progressivement que c'est surtout Dheepan et Yalini qui sont aux centres du film plus que Illaya. Et c'est quand même un peu dommage un tel déséquilibre. Cela dit, le fait qu'ils s'expriment dans leur langue est bien vue. Cela dit...l'anglais ? Euh ils sont en France, mais disent à la fin quelques mots d'anglais ? Bon bah ok...



Vraiment clichée la cité ?



L'histoire est particulièrement bien racontée, là il n'y a pas de problèmes. Seulement voilà, il manque un peu de sens du réel. Cela dit, il est difficile de dire si l'histoire n'est pas réaliste surtout qu'il s'agit d'un scénario inspiré des Lettre Persanes de Montesquieu et aussi de la vraie vie d'Antonythasan Jesuthasan. Ce qui fait qu'on a une oeuvre assez hybride entre fiction et réalité.


Bref, on peut trouver non réaliste le fait qu'ils arrivent à entrer clandestinement en France sans que la police ou la gendarmerie ne soit inquiété. Mais pour ça il y a une explication rationnelle : Le traducteur. Ce dernier étant dans la confidence il a sans doute tout fait pour qu'il ne soit pas inquiété pour avoir une dette hors champ


Ce qui me dérange le plus, ce sont certaines pistes narratives lancées mais non explorées. Mais on peut penser que l'auteur aime à brouiller les pistes.


Une piste lancée, la relation entre Yalini et Brahim. A un moment donné, j'ai bien cru qu'ils allaient finir ensemble, et bien non ! 2e piste, le faite que Dheepan veuille acheter un collier pour Yalini, là non plus une piste inexplorée. Et enfin, le retour du général de Dheepan. qui au final le bat mais après on n'entend plus parler.


En clair, le film regorge de routes narratives qu'il aurait pu emprunter mais s'est concentré sur un seul thème : comment la famille va-t-elle prospérer dans le mensonge en plein quartier sensible ? Du coup, c'est l'idée même de la famille qui prime. Et la réponse est limpide : Dheepan a une nouvelle famille qu'il devra protéger en dépit de l'orgueil qui l'étreint. Cela dit, on peut se demander que les épreuves qu'ils traversent ne sont pas si insurmontables que ça. L'auteur a décidé de ne pas aborder certaines épreuves (genre l'intervention des représentants de la lutte contre l'immigration clandestine) par crainte du cliché évident. Mais paradoxalement, il rend l'histoire moins crédible vers la fin (on peut difficilement croire qu'en France une guerre des gangs se soldent comme ça, sans l'intervention de la police).



Palme d'Or méritée ?



La question ne se pose même pas. Il mérite amplement sa palme. Cela dit, comme tous les films d'Audiard, il est loin d'être parfait à cause de la recherche de la perfection qui au final laisse entrevoir certaines approximations. Cela dit, il s'agit d'un film qui prend au tripe et que je vous recommande sans hésité. Anecdote marrante, je l'ai vu dans une salle remplie d'enfants. Je me demande si les parents ne se sont pas plantés d'heures car il diffusait le Petit Prince avant ça.


Version fun de ma critique ici

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le 14 sept. 2015

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Neo Cosmic

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