L'enfer et le paradis
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Incontestablement, Jacques Audiard n'a pas le talent de Clint Eastwood ou Martin Scorsese. Pourtant, ce sri lankais que l'on suit pendant plus d'une centaine de minutes ressemble étrangement au justicier incontrôlable de Dirty Harry mais aussi au violent Taxi Driver.
Pendant la première heure, le film se déroule sans déplaisir. Ce Dheepan n'est pas totalement dénué de qualités cinématographiques. Les dialogues sont plutôt bien écrits, les acteurs (non professionnels) font parfaitement l'affaire, et on s'ennuie assez peu. Pour autant, la mise en scène (pourtant encensée par une partie de la critique) est assez pauvre et parfois faussement géniale (louer l'ingéniosité de la scène d'apparition dans le noir du serre-tête du personnage principal, franchement...).
Le réalisateur réussit relativement bien à traiter les relations faussement familiales de ces immigrés forcés de vivre ensemble. Les difficultés pour obtenir les papiers, la découverte de la langue française, l'apprentissage de l'humour français ou encore l'initiation aux charmes de l'immobilier de banlieue sont autant de scènes plutôt intéressantes.
Néanmoins, cette Palme d'Or souffre indéniablement de deux défauts majeurs. Le premier est la récurrence d'erreurs d'écriture. On pense notamment à l'amourette entre la compagne de notre héros sri lankais et Lorànt Deutsch (interprété par Vincent Rottiers) devenu pour un temps caïd de quartier qui rend complètement illisible et incompréhensible l'histoire de notre troupe de sri lankais. De la même façon, la rupture brutale qu'offre la dernière partie du film vient gâcher le début de subtilité qui se profilait tout au long du film.
Le second défaut de cette Palme d'Or est bien plus dérangeant. Jacques Audiard se cache derrière la fiction pour déverser une morale et un message franchement désagréables. La situation dans les cités françaises est déjà suffisamment difficile, pourquoi vouloir être dans l'outrance ? La France est ici un pays où toutes les femmes portent le voile (et semblent obligées de le porter), et les tirs d'armes sont aussi communs que les fouilles par les gangs à l'entrée des cités.
Enfin, décrire l'attrait de cette population pour l'Angleterre est judicieux puisque cela correspond à une certaine réalité mais nourrir ce faux rêve en faisant croire que l'Angleterre accueille bien mieux ses migrants est au mieux une méconnaissance impardonnable de la situation des banlieues anglaises, au pire un mensonge nauséabond.
Si ce Dheepan laisse également cette sensation de vide une fois la scène finale passée, c'est aussi parce que la quête du personnage principal est aussi inintéressante que la vie d'une starlette de télé réalité : obtenir le confort matériel (en faisant abstraction de toute autre réflexion).
Avec Entre les murs (vide de toute qualité cinématographique) et cette nouvelle Palme d'Or qui vient affoler mamie qui regarde le journal de Jean-Pierre Pernaut, on peut légitimement se demander quel regard porte le festival de Cannes sur nos banlieues...
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le 10 sept. 2015
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