Un cadavre avant le dessert !

Au moins, moi, si j'avais eu l'idée d'aller me pendre dans le jardin d'un hôte, durant un dîner, auquel je me suis invité, j'aurais eu la décence, par politesse et par gourmandise, de goûter au clafoutis avant. Blague à part, il s'agit ici, pour les protagonistes de notre histoire, de se débarrasser d'un cadavre pour que le couple, propriétaire des lieux, au bord de la ruine, puisse vendre leur luxueuse maison à un prix maximal et ainsi s'assurer un avenir pas trop sombre...

Le coup de la comédie d'un mort encombrant n'annonce rien d'original ; encore plus de l'autre côté de la Manche, où c'est un motif d'humour noir récurrent (oui, l'action se passe à Londres !). Cela existait déjà, notamment, chez Robert Louis Stevenson avec The Wrong Box.

Et ce n'est pas la réalisation de Matt Winn, très "théâtre filmé" (ne balançant aucune idée de mise en scène un tant soit peu originale, qui change cette impression !), puisque si on excepte, dans le dernier tiers, une petite escapade à l'extérieur, tout se déroule dans une habitation cossue et dans ses immédiats abords.

En plus, si on est habitué à ce genre de films ou même au théâtre de boulevard en général, les rebondissements et retournements de situation sont prévisibles. Avec, en supplément, des remords peu crédibles, sur la fin, de la maîtresse de maison (vu son profil psychologique et la force de ses motivations pour agir comme elle l'a fait auparavant !), qui ne sont présents que pour relancer artificiellement l'ensemble.

Il ne peut donc que rester, pour rattraper le tout, une éventuelle satire des Londoniens huppés, avec des personnages hauts en couleur, des échanges cinglants et des comédiens qui assurent. Mais, si ces derniers essayent de donner le meilleur d'eux-mêmes, ils n'ont pas la possibilité de faire grand-chose avec une écriture sage, ne se permettant que sporadiquement une réplique pleine d'esprit, les empêchant de lâcher le moindre grain de folie (au niveau du comportement, des expressions du visage ou du corps !), la durée des plans étant notamment trop courte pour cela. Sur ce point, je me sens obligé de citer l'exemple de Death at a Funeral (Joyeuses Funérailles en VF !), long-métrage qui est un véritable danger pour vos zygomatiques et vos côtes, tellement il est hilarant de bout en bout.

Frank Oz, le réalisateur de ce petit bijou d'humour noir, a eu l'intelligence de laisser la caméra sur ses acteurs pour que ces derniers puissent offrir le meilleur d'eux-mêmes, y compris un certain Alan Tudyk, qui est à pisser de rire en gars ingurgitant, bien malgré lui, une drogue super-puissante et se comportant en conséquence. Oui, le même Alan Tudyk, jouant ici le maître de maison, et qui n'a pas la possibilité de faire grand-chose, trop restreint qu'il est, comme ses partenaires.

Et pour la satire des Londoniens huppés, ben, il y avait un contrepoint qui s'annonçait assez efficace au début, d'autant plus qu'il paraissait vouloir en souligner la médiocrité, mais comme il se pend très vite dans le jardin, sans goûter au clafoutis, le réalisateur se prive très vite d'un avantage. Dommage tout cela...