Volker Schlöndorffn, un habitué des adaptations théâtrales au cinéma, s’attaque à la pièce de Cyril Gély sortie en 2011, Diplomatie. L’occasion de toucher un public plus large et de revenir sur un événement de la seconde guerre mondiale qui reste encore peu connu à ce jour : la nuit du 25 août 1944, tandis que les alliés sont aux portes de Paris, se joue le destin de la capitale. Hitler veut en effet détruire la ville, restée symbole resplendissant tandis que Berlin est tombée en ruines. S’engage alors un face-à-face entre un consul suédois amoureux de Paris, Raoul Nordling, et le général allemand Dietrich von Choltitz, un être froid et sans scrupule, chargé par le Führer d’accomplir son noir dessein.
Le duo André Dussolier et Niels Arestrup incarnait déjà ces deux personnages dans la pièce de Cyril Gély. Et comme on pouvait s’y attendre, c’est un vrai duel au sommet auquel nous assistons. Enfermés dans l’espace restreint d’une chambre d’un grand hôtel parisien, les deux hommes se confrontent dans des dialogues passionnants, et on se régale des manipulations et des rapports de forces qui évoluent sans cesse. André Dussolier, malicieux par moments malgré la situation, apporte à son rôle de consul une force tranquille, presque flegmatique. Niels Arestrup arrive quant à lui à apporter une grande humanité à son personnage, puisqu’on finit même par ressentir de l’empathie pour ce vieil homme en face d’un choix cornélien.
De grands acteurs, donc, qui rendent justice à un texte intelligent : au lieu d’essayer d’installer tout du long une tension inutile qui consisterait à se demander si Paris va être détruit, Diplomatie se concentre plutôt sur la façon dont Raoul Nordling parvient à raisonner le général allemand. En effet, von Choltitz, au départ si buté, va au fur et à mesure se relâcher pour finalement se dévoiler et montrer ses doutes. La victoire des mots contre les armes.
La psychologie des personnages est extrêmement bien développée et sur la petite heure et demi du film, jamais on ne s’ennuie. C’est dire à quel point l’échange entre les deux hommes est captivant, puisque le final ne laisse aucun suspense : on sait de toute manière que Paris sera sauvé.
Ne se résignant pas à faire du simple théâtre filmé, Schlöndorffn utilise certes des procédés cinématographiques, mais qui restent rares : majoritairement en huit-clos, le film est parsemé de séquences plus filmiques, comme l’utilisation d’images d’archive notamment, qui aide à placer le contexte de l’histoire lors du générique d’ouverture, et les quelques minutes de fin qui se passent en extérieur.
Diplomatie fait fi des exactitudes historiques (les deux hommes ne se sont jamais retrouvés dans une chambre d’hôtel et ne parlaient même pas la même langue) et demeure un divertissement de très haute facture. Si on pourra évoquer un manque d’audace dans la mise en scène, le choix de se faire jouer le destin de tout Paris et de ses millions d’habitants dans une chambre d’hôtel est tout aussi intéressant. Cela permet de plus de mettre en avant le principal atout du film, la performance des acteurs, livrés à eux-mêmes.
Sans être du grand cinéma, ni tout à fait du théâtre filmé, Diplomatie permet au final de passer un agréable moment, qui donne envie d’en savoir un peu plus sur la véritable histoire de cette fameuse nuit du 25 août 1944. Les parisiens, quant à eux, sortiront de salle amoureux de Paris. Du moins un moment.