Tragiques poupées de marionnettes
Du risque d'écrire plusieurs histoires en un film : qu'elles ne se valent pas toutes, par comparaison.
Celle de la chanteuse défigurée est moins fascinante, même si le geste désespéré de son fan et la banalité avec laquelle Kitano traite son destin tragique est d'une puissance dramatique assez folle.
Celle du chef yakuza a quelque chose de naïf, contrebalançant la sauvagerie avec laquelle le réalisateur a toujours dépeint ce milieu (qui le fascine, à n'en pas douter). Comme une parabole, ou une petite chansonnette populaire. Un autre signe de la main au temps qui passe...
Mais le coup de génie de Dolls, d'un point de vue dramaturgique et émotionnel, c'est évidemment le sort des deux amants que l'ambition et le respect des avis de sa famille de l'un (l'espace d'un court instant) va condamner à un triste voyage.
Et là, on est dans le théâtre pur, la vraie folie et originalité scénaristique, picturale, psychologique. Dans la liberté de ton totale, où rien ne semble inquiéter l'auteur, évitant ainsi l'improbable ou le ridicule qu'aurait pu induire son idée. Du vrai cinéma, dans le sens où les plans illustrant ce tronçon d'histoire justifient l'expression par la caméra, par le jeu, les couleurs et les formes.
Pour l'amour des émotions que procure la tragédie.