Mitigé, vraiment très mitigé.
D'une part, une caricature manichéenne des gentils SM prévenants, curieux et incompris et des méchants fauteurs de l'ordre d'autant plus sévères et bornés qu'ils sont catholiques. Un mélange nauséeux de 50 nuances de Grey et d'Hellraiser gentillet.
D'autre part, une habile critique des ressorts soi-disant froids et impartiaux de la justice, qui s'avèrent plus partiaux encore que ce qu'il cherchent à nuancer (Tiens, Hegel, prends ça dans les dents !), et une représentation distanciée du sexe brut qui n'est pas sans rappeler la mise à distance du viol dans Viol de Botho Strauss.
Une photographie recherchée et une réflexion intéressante sur les orientations sexuelles et sur l'acceptation de l'autre sous l'empire de l'amour.
Un postulat de départ scientifique très intéressant, pourtant non réitéré dans la suite du film: la souffrance comme une drogue. Cette piste narrative est mal exploitée, tout juste esquissée. Dommage ...
Mais des relents anti-cléricaux (le sempiternel fantasme d'une théocratie catholique qui n'existe plus, la croyance imbécile en les bornes imposées par une religion pourtant très ouverte à l'évolution du monde) et des personnages que l'on suit pour ce qui est des sentiments mais dont on s'éloigne au vu de leurs trips morbides.
Difficile d'adhérer à un camp ou un autre, les libertins SM ou les autocrates semi-religieux, tant les deux semblent absurdes et compréhensibles à la fois.
Domination se vent comme un 50 Nuances de Grey mais s'assume et s'intéresse moins à la sexualité qu'à son approche par la sphère publique. Il en résulte un appel à la réflexion inattendu et positivement intéressant. Et, dans le même temps, c'est justement cette intrusion de ce qui relève de l'intime dans des sphères partiellement publiques ou totalement publiques qui crée la gène et l'impossible adhésion aux événements relatés. L'esprit voyeur associé à une sexualité sous son jour non le plus obscène mais le plus ridicule - à l'image d'un esclave SM accroché à un mur, une boule dans la bouche, saluant tout ce qui passe, soit la rencontre entre Clive Barker et Lewis Carroll qui en tiennent une bonne ! - crée un blocage que le pamphlet judiciaire seul, plus Kafkaïen et prenant, relève.