Une caravane de cinéma, où une maquilleuse prépare des figurants. On vient les chercher brutalement et on les fait courir à travers une zone de guerre. Ils jouent les faux civils éplorés devant les images d'actualité montrant un autobus détruit par les tirs ukrainiens. Bienvenue dans le Donbass séparatiste, un territoire aux mains de groupes armés, où règne la corruption, la manipulation et où cependant des hommes et des femmes vivent au quotidien.
Il règne un léger parfum de décomposition dans ce film, qui repose sur un certain nombre de saynettes, qui esquissent un état des lieux en forme de procès à charge. Evidemment, il m'aurait fallu me renseigner davantage sur les événements afin de bien comprendre toutes les nuances du film.
Les saynettes suivent donc différents aspects de la vie quotidienne dans le Donbass, avec à chaque fois, au début, une didascalie précisant le lieu. On voit donc des passagers d'un bus accepter avec résignation le racket d'un point de contrôle, une femme politique venir jeter un bol de merde sur un rédacteur en chef qui l'accuse de corruption, un trafiquant faire mine d'avoir découvert une cache (qui lui appartenait) pour apaiser le personnel d'un hôtel, un groupe d'illuminés rencontrer un pope aux airs d'homme d'affaires à propos d'un gala religieux en faveur des héros, et du retour de reliques (ils mendient l'utilisation d'une Mercedès pour donner un cachet officiel), un pauvre gars comprendre qu'il ne pourra pas récupérer sa voiture "réquisitionnée" par l'armée de libération locale, un volontaire ukrainien, ligoté à un poteau, se faire lyncher par une foule (scène longue et désagréable), un journaliste allemand chercher à interroger une escouade séparatiste, un autre filmant l'intérieur d'un taudis, un mariage fort vulgaire mené par une maire prorusse désespérée, etc...
Les thèmes qui reviennent sont l'impossibilité de mener une vie normale, la difficulté de comprendre ce qui se passe réellement (omniprésence des téléphones portables, qui servent à ne pas laisser passer la moindre occasion de manipulation), la violence au quotidien, le choc des identités russes et ukrainiennes. Il y a une réelle dénonciation du nationaliste séparatiste, qui traite tous les gens qui critiquent l'intervention russe de "fascistes", réactivant les clichés de la Grande Guerre Patriotique contre les nazis.
C'est un film à sketch, qui aime bien reposer sur les plans-séquences, qu'il réussit fort bien. C'est aussi un film à thèse, dont les tenants et aboutissants m'ont sans doute parfois échappés.
Vu aux Montreurs d'images à Agen.