Il y a deux niveaux, dans Dounia et la princesse d'Alep. Parfois, il est difficile de se dire que c'est un film pour les enfants, tandis que parfois, on a du mal à croire que c'est autre chose qu'un film pour les enfants. Une première partie assez réaliste, décrivant la culture syrienne, la nourriture d'Alep, puis l'arrivée de la guerre de manière assez violente si on s'attend à un film jeune public, mais parsemée de légendes syriennes et histoires pour les enfants, notamment celle de la Princesse d'Alep. Une deuxième partie, disons l'exil, quitte le réalisme pour la magie : comme si la fantaisie et le merveilleux des histoires et légendes racontées au début, se réalisaient. La naïveté et la poésie des dessins accompagnent cette odyssée. Chez Homère, les dieux étaient contre Ulysse, ici, ils sont avec Dounia et sa famille. Toute embûche est vite réglée, grâce à la magie. Marya Zarif et André Kadi s'essaient donc à la guerre vue et racontée par une enfant, dans un langage mélangeant des mots français et arabes, avec un accent étranger, ce qui participe au charme du film comme à son étrangeté, à l'attachement des personnages comme à leur soudaine distanciation. Malgré tout, par les dessins, par la poésie, par le rythme, ponctué de musiques locales, de nombreuses émotions traversent le film délicatement, de la tendresse, de la peur, de l'enchantement. Réalisé par une dessinatrice d'origine syrienne, Dounia et la princesse d'Alep reste toujours positif : le grand père répète qu'on ne quitte pas chez soi, que c'est partout chez soi (mais on voit l'inverse), qu'il faut rester optimiste et joyeux dans toutes les circonstances. Les réflexions d'enfants de Dounia, les réponses des adultes, différents points de vue sur la situation, forment un ensemble qu'on peut trouver un peu naïf, mais cet état d'esprit, sans effets larmoyants, fait couler la larme qui nous rappelle à notre humanité, rappelant La vie est belle de Begnini. Reste à savoir ce qu'un enfant français verra et comprendra, et comment il réagira quand il verra des Syrien.nes dans la rue...