Je ne sais pas s'il est innocent. J'ai un doute.
Ces douze hommes entrent dans la salle, ils pensent qu'ils vont sortir rapidement. Pas de noms, on ne les connait que par leur numéro. Tout est contre l'accusé, rien ne semble le donner innocent. Ne semble. La caméra se balade et c'est comme si on y était. Je n'ai pas remarqué que la caméra bougeait. C'était fluide, clair, précis, travaillé. On suit ces 12 hommes, et alors que tout le monde pense assister à une séance comme les autres et trancher vite, voilà que un s'interpose. Il ne s'interpose que par ordre moral, car il a un doute. Mais un doute ne suffit pas pour envoyer un enfant à la mort. Et c'est là que le débat commence.
Les acteurs sont tous exceptionnels. Ils jouent tous parfaitement leur rôle. Ces rôles sont tous importants, car chacun a sa psychologie, et chacun joue un rôle dans l'avancement du dialogue. Il y a ceux qui ont cette intention ferme, ceux qui veulent juste que ça se termine, ceux qui sont dans le doute mais qui ne veulent pas l'exprimer, et, seul contre tous, le dernier qui exprime son doute.
C'est une véritable expérience psychologique et philosophique. Nos conséquences n'ont aucun effet sur nos vies directement, mais décident de la vie ou la mort d'un jeune. Tout semble contre lui, alors on on le plaide coupable. Mais dans le doute, il faut dialoguer jusqu'à être unanime. Il faut convaincre, et leur expliquer. Il faut réfléchir, exploiter le moindre détail, et mettre de coté les préjugés. Là est toute l'importance. La justice, ce n'est pas l'avis personnel, c'est l'avis de tous, c'est vérifier.
Il montre également le coté psychologique de la chose. Ces hommes au départ, ne sont là que car ils sont conviés et ne veulent que sortir. Au début, seul très peu prennent la chose au sérieux. Au final, tout le monde se sent concerné. Voir l'évolution des personnages qui, petit à petit, prennent conscience, convaincus, est incroyable. Par des expériences et des manipulations, nous finissons par nous prouver malgré nous que nous avons bel et bien tord. Ensuite, il faut avoir la raison de le reconnaitre.
(Spoilers, ne pas regarder si vous n'avez pas vu. Je vous en prie.)
Ces scènes m'ont marqué. J'en parle parce qu'elles ont eu un effet rare sur moi.
La manipulation par l'homme énervé (le dernier à plaider non coupable). Alors qu'il comprend qu'il a tord, il ne veut pas l'accepter. C'est incroyable.
La scène la plus marquante restera l'homme bourré de préjugés, qui, balançant ses arguments non valides car son opinion personnelle, tous les membres, un par un, sortent de la table, et lui tourne le dos. Cette image est une des plus fortes que j'ai jamais vu dans un film. Seul un l'écoute, par respect, et au final, lui demande de s'assoir et se taire. Il comprend alors que les préjugés et les opinions personnelles n'ont aucun rapport avec la justice. Il sort alors de la table.
J'ai trouvé ça exceptionnel comment tous ces hommes sont amenés un par un au doute pour au final, plaider non coupable à l'unanimité. L'évolution profonde des personnages, très étudié et travaillé, nous mène au point qu'on pensait dès lors impossible. C'est pour cela que ce film est excellent.
(Fin des spoilers)
Douze hommes en colère est une véritable expérience qu'il se faut de voir une fois au moins. Extrêmement bien ficelé, bien mené et qui nous amène vraiment à nous poser des questions sur la faculté de juger les autres, c'est un très grand moment de cinéma, qu'il se faut de voir, pour ne pas mourir idiot.
Et les douze hommes quittent la salle. Voilà que se termine, dans l'ombre, l'une de ces nombreuses discussions dont on ne saura jamais le déroulement.