C'est une histoire très connue mise en scène par Victor Fleming en 1941. Ce n'est pas la première et beaucoup considèrent que la version de Mamoulian dix ans auparavant est la vraie référence en ce domaine. Je ne vais pas opter pour la comparaison mais dire pourquoi celle-ci me semble parfaitement défendable.
Le problème de ce type d'histoire est que chacun connait le synopsis de ce roman de Stevenson, même sans l'avoir lu. Il s'agit donc de choisir un moyen de la rendre intéressante alors qu'on sait ce qui va se passer.
Il me semble qu'ici il y a d'abord le casting: Spencer Tracy, Ingrid Bergman et Lana Turner sont vraiment excellents. Le premier est le scientifique ému par la mort d'un de ses malades qui décide de tester sur lui-même un breuvage qui pourrait soigner la schizophrénie en séparant le Bien du Mal. On sait qu'il se trompe mais on est forcément touché par ce choix d'un homme de science qui prend un risque important , même s'il le fait aussi pour une raison personnelle ...
Cette raison se nomme Ingrid Bergman qui joue à contre emploi le rôle d'Ivy, une serveuse qui lui fait du charme alors qu'il est fiancé à Lana Turner, Beatrix, elle aussi à contre emploi avec son air sage et effrayé (alors qu'elle devait initialement joué le rôle d'Ivy)
Dès lors le film prend une tournure intéressante puisqu'il pose diverses questions éthiques, morales, religieuses et nous renvoient à nos propres interrogations. Le film est à ce sujet très "bavard" mais il permet de bien définir les enjeux.
Le décor est lui aussi remarquable On se croirait vraiment à Londres au XIX ème siècle, en passant des beaux quartiers aux lieux sordides, du "bien" au "mal" ( la distinction n'est pas si simple).
En revanche, le point faible est plutôt la transformation du Docteur Jekyl en Hyde. Ce n'est pas très réussi mais c'est aussi parce que le metteur en scène a voulu un Hyde plus pervers que monstrueux avec des ellipses qui laissent entendre les horreurs subies par Ivy la serveuse. On peut regretter ce choix qui techniquement déçoit un peu mais se défend intellectuellement ...
Au final une version agréable qui met en valeur des comédiens remarquables dans un récit bien connu construit d'une manière originale par un metteur en scène qui n'est pas n'importe qui. Vous connaissez sûrement Autant en emporte le vent ...
Le titre fait référence à une chanson de Philippe Chatel ...