Francis Ford Coppola redonne vie au mythe de Dracula avec ce récit inspiré et malfaisant.

Francis Ford Coppola redonne vie au mythe de Dracula. Moins narratif que ses prédécesseurs, plus émotionnel, le film se révèle inspiré et poussé aux extrêmes de la malfaisance.

De toutes les adaptations du célèbre roman de Bram Stoker, celle de Francis Ford Coppola est sans doute celle qui s'en rapproche le plus. Cependant, le réalisateur du "Parrain" et d'"Apocalypse Now" opte pour un aspect visuel et une ambiance poussés aux extrêmes, délaissant l'histoire en elle-même pour laisser place à un exercice de style d'une beauté malfaisante. Gary Oldman atteind le sommet de son art en incarnant le compte Dracula, prince du Moyen-Age damné à vivre éternellement en se nourissant du sang de ses victimes. Bien des cinéastes se sont lancés dans le monde de Dracula, présentant le personnage comme l'incarnation parfaite du mal, mais peu ont poussés le mythe au trash que nous réserve celui-ci.

Bien que l'histoire de "Dracula" mêle horreur et fantastique, c'est l'amour, la sexualité et la bestialité du récit qui sont ici reproduites. Doté d'un incroyable sens de la mise en scène, Francis Ford Coppola n'y va pas de main douce et enchaîne les scènes provoquant le malaise des spectateurs. Dans ce "Dracula", il est question de la passion qui relie Dracula à son ancienne épouse réincarnée, Mina (Winona Ryder). Pour la retrouver, il va quitter son château en Transylvannie et s'établira en Angleterre, ce qui lui permettra par la même occasion de retrouver toute sa force de jeunesse en buvant le sang de ses victimes. Cependant, il va se heurter au professeur Abraham Van Helsing (Anthony Hopkins) ainsi qu'au fiancé de Mina, Jonathan Harker (Keanu Reeves), qui feront tout pour mettre fin à ses sombres desseins.

Le caractère du personnage de Dracula est ici parfaitement décortiqué à travers des scènes qui le présentent tantôt comme la créature du démon, tantôt comme la victime de la malédiction. Rarement a-t-on vu un Dracula si malheureux de son sort, tout comme rarement a-t-on vu un Dracula si impitoyable, cruel et invulnérable. Francis Ford Coppola nous présente le vampire comme une créature insufflant la passion et le désir sexuel à ses victimes afin de mieux l'attaquer par la suite, un peu sous la forme d'un viol. Ainsi, il ne faut pas s'étonner de découvrir des scènes trash dotées d'une immense lascivité comme celle par exemple où Dracula, sous son aspect de loup-garou, fait l'amour à l'amie de Mina dans un jardin en proie à un orage nocturne. La séquence où Jonathan Harker est envoûté par les trois femmes de Dracula en est un exemple aussi.

Le grand pouvoir de "Dracula", c'est qu'il nous envoûte avant d'attaquer notre esprit et de le choquer avec des images et des scènes repoussantes. "Dracula" a d'ailleurs tous les ingrédients pour garantir cet effet: un casting de marque, un budget considérable, des effets spéciaux vieux-jeux mais ultra réalistes, une musique imposante, répétitive et lourde ainsi qu'un montage enchaînant les horreurs. Ce n'est pas la façon dont le film est filmé ni le montage ni quelque effet d'optique que ce soit qui suscite le mal de crâne, mais bien le concept trash du film en lui-même. Coppola décore son film d'un style gothique et l'agrémente de lourdeurs stylistiques à l'origine du malaise.

Voilà une oeuvre stylisée, utilisant le mythe de "Dracula" comme outil pour une oeuvre d'art pleine d'émotion, de lascivité, de violence et d'inspiration. Francis Ford Coppola dérange et fascine à la fois par ce style qui en rebute plus d'un et nous livre ainsi une oeuvre magnifique – parfois incomprise – et expressive!
Ciné-Look
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le 2 déc. 2013

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