Nouvelle étape dans ma quête cinéphilo-indienne, à la découverte des films plébiscités sur IMDB et mis en exergue dans les tops 250 annuels. Je ne peux pas dire que ce soit vraiment une surprise : "Drishyam" rejoint la longue liste de déceptions systématiques et de produits extrêmement formatés, qu'ils soient en provenance des industries bollywoodiennes comme ici (basée au nord vers Bombay, tournée en hindi, l'industrie la plus importante en volume, caractérisée entre autres par des séquences dansées ou chantées) ou kollywoodiennes (basée à Madras, tournée en tamoul). Tous ces films vus récemment se ressemblent beaucoup, "12th Fail", 'Haider", " Pariyerum Perumal", "Jai Bhim", voire même "3 Idiots" dans un registre tout aussi commercial mais beaucoup moins sérieux : une durée de 2h40 environ, une mise en scène tapageuse, une utilisation de la musique (hors séquences musicales) aussi clinquante qu'un blockbuster hollywoodien lambda, des bons sentiments étalés en tartines gigantesques et indigestes... Quels que soient les registres investis, en l'occurrence ici le thriller qui se frotte au drame familial, la formule est rigoureusement la même.
Ici les ennuis tiennent à deux sources. D'abord, les clichés à la pelle : l'homme bon sans histoire, les emmerdes qu'il gère en parfait père (comprendre chef) de famille, l'introduction amorçant un flashback légèrement mensonger, et tout le cortège de figures-symboles éculées, le flic teigneux que tout le monde déteste, la cellule familiale malmenée qui avance contre vents et marées, le plan incroyablement minutieux échafaudé à la perfection... Bref, autant de ressorts puissamment soporifiques qui brillent par leur caractère attendu, par leur vanité, l'artificialité de leurs mécanismes et de leurs articulations. Ensuite, on n'insistera jamais assez sur l'éléphant au milieu de la pièce passé sous silence : derrière les 2 heures de bras de fer entre un homme et l'intégralité de l'institution policière contre lui (rappelons que cette dernière affirme "on peut pas utiliser de détecteur de mensonge, il nous faut une ordonnance du tribunal", ce qui plierait l'affaire, mais ne voit aucun problème dans le tabassage en règle de la famille pour obtenir des aveux), il y a quand même le camouflage et la justification d'un meurtre en mode auto-défense morale. C’est d’un fascisme latent tout à fait gerbant.
Et quand on songe au fait qu'il existe quatre versions / remakes de "Drishyam" réalisées entre 2013 et 2015...