Lui, instable. Elle, déstabilisée. Liens étranges noués "autour de minuit"

Un parking d'autoroute plongé dans une désertique pénombre est, en effet, un "drôle d'endroit pour une rencontre". Il faut en fait des circonstances assez absurdes, comme celles qui constituent le préambule de ce 1er film de François Dupeyron. Arrêt brutal d'une voiture. Ouverture de la portière passager. Chute sur le bitume d'une jeune femme éjectée. Ce, sous le regard indifférent d'un type en train de bricoler son moteur près d'un reverbère ! Le spectateur, qui a vu la dispute précédant l'effarante rupture, attend la suite. Impatient de regarder vivre le drôle de couple que le destin vient de former.
Durant deux nuits et deux jours condensés en 1 h 40 de projection, l'homme étrange et la jeune femme abandonnée vont unir leurs solitudes de façon aigre-douce. Entre eux, s'installe d'abord une incompréhension teintée de mépris. Lui se comporte en macho énervé par cette présence et surtout cette séduction féminine b.c.b.g. dont il a sans doute été victime par le passé. Elle, naïvement amoureuse au point de croire au retour de l'ingrat, fuit ses sarcasmes et l'ignore... sauf pour lui demander l'heure. Et celle-ci tourne : 21, 22, 23 heures. "Autour de minuit", le froid et le désir de se raconter les réunissent dans la voiture moins en panne que leurs affectivités. Ils nouent enfin des liens cordiaux, à défaut d'autre chose.
Le lendemain matin, grand revirement. Face à cette jolie femme tout à fait déstabilisée dans sa vie et ses sentiments, il est l'homme instable qui se dit prêt à aller n'importe où avec elle. Pour commencer, ce sont les 10 kilomètres qui séparent le parking d'une cafétéria voisine. Là, entre routiers fanfarons et serveuses résignées (sauf une, interprétée par une débutante prometteuse, Nathalie Cardone), ils vont être au centre d'un étonnant chassé-croisé...
La fin rassure...
Il faut l'avouer : ce film brasse tellement de thèmes majeurs, à commencer par la solitude et l'incommunicabilité, que la perception proposée ici peut sembler réductrice. Le riche texte et les déstabilisantes images sont à décrypter en fonction d'aspirations/frustrations personnelles.
Il faut dire surtout que la puissance et l'originalité du récit imaginé par François Dupeyron ne seraient pas aussi (dé)flagrantes sans la magistrale interprétation en duo de Gérard Depardieu et de Catherine Deneuve. Il a eu cette très éclairante appréciation : "Ce qui est vraiment beau, c'est qu'il aime cette femme là où elle ne s'aime pas !".
Au fil de magnifiques extérieurs nuit, ces deux géants du cinéma français en étaient déjà à sceller leur 5e rencontre !

Ticket_007
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le 1 juin 2020

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