Le script était concis : ”grand acteur échange une vieille voiture contre Deneuve”. Le grand acteur en question, c'est Depardieu, pour une ixième collaboration vouée à son propre culte. En ça, la grande ligne précitée ne va pas être accompagnée de petites lignes aussi fantastiques. Les dialogues radotent, les répliques piquent du nez. L'aire d'autoroute manque de poésie et le duo s'étouffe sur la psychologie de ses personnages.
Il faut attendre que l'ambiance se construise, comme l'autoroute qu'on ne prend jamais, comme la promesse de partir du film sans que cela ne soit, bien sûr, possible. Et l'arbre de goudron finit par porter ses fruits néo-noirs, la psychologie bouche ses ornières par la force de se connaître, nous et les personnages, et la surcouche des conversations s'homogénéise enfin comme la nuit au-dessus des lampadaires. Il fallait lire entre les lignes (blanches) pour voir la poésie, et la voici qui éclot avec la force molle d'une plante perçant le tarmac.
Dommage que cela doive venir avec la vacuité d'une histoire ne contenant au final pas grand chose, à part la morne atmosphère portée dans des relents de sueur et de bière par les routiers pour qui l'aire de repos fait comme une oasis. Ici, ce n'est pas du sale qu'est née la beauté.
Quantième Art