Vous voulez savoir comment intimider un adversaire lors d'un duel, à quelle hauteur de cuisse on porte le holster, comment manoeuvrer une bande de citoyens avinée par l'alcool et réclamant une exécution immédiate ?
Avouons que ce genre de compétences n'est pas très utiles au commun des mortels que nous sommes en ce début de 21e siècle, mais le jeune Ben Owens (ANthony Perkins), shérif débutant d'une petite ville perdue dans l'ouest américain du 19e siècle, paierait cher pour qu'on les lui enseigne.
Et le monde d'Anthony Mann est si bien fait que son mentor va se présenter dès la première scène du film, injustement titré en français "Du sang dans le désert", sous les traits d'Henry Fonda, chasseur de prime taciturne et peu loquace. Les premières minutes de ce film sont d'une rare efficacité. En peu d'éléments Anthony Mann installe ses personnages, ses enjeux, ses rapports de forces et les quelques lieux récurrents qui rythmeront les scènes. Les cadrages sont magnifiques et d'une efficacité narrative qui seront repris par certains western spaghetti.
En à peine 1h30 le film aborde des thèmes incontournables du genre : le pouvoir du collectif face au pouvoir du singulier, du pouvoir donnée versus le pouvoir qu'on arrache, de la volonté de ne pas transiger avec ses principes. Mais avance aussi sur le territoire du racisme, du métissage et de la transmission. En 1957 le cinéma européen, moins efficace dans sa construction mais tout aussi manichéen dans son traitement, ne pouvait pas s'enorgueillir d'être aussi exemplaire entre efficacité du propos et notion de divertissement
Si l'histoire n'est pas à proprement parler prenante, il n'en reste pas moins qu'Anthony Perkins, Lee Van Cleef et Henry Fonda soutenus par le savoir-faire de Mann ça donne à l'écran un film qui, s'il n'avait du compter que sur son seul scénario, n'aurait pas tenu aussi joliment la route.
Et puis voir Henri Fonda jouer l'ancien shérif aigri recyclé en chasseur de prime impitoyable qui finit par s'humaniser au contact de ce petit enfant métis, ça laisse songeur quant à l'absence de film français mettant en scène un gradé du GIGN apprenant à un petit immigré nord africain à faire du vélo... A ma connaissance en France, chantre des valeurs humanistes, aucun film avec un scénario de ce genre ne fut réalisé par un frenchy cette année là... ou presque !