Duel à Monte Carlo del Norte
6.2
Duel à Monte Carlo del Norte

Long-métrage d'animation de Bill Plympton (2023)

Un après-midi j’ai entendu parler du « maître incontesté de l’animation américaine », nommé aux Oscars, autofinançant tous ses films, dessinant lui même chaque scène à la main. Il s’appelle Bill Plympton, ce qui est déjà baleze en soi, il est américain, et il se bat pour que l’animation devienne aux États-Unis autre chose que l’art des enfants. J’ai vu ses Plymptoons, puis Your Face, et j’ai décidé que je l’adorais. J’ai aussi vu qu’il était à Paris pour présenter son prochain long métrage d’animation en avant première, et surtout, que c’était dans 30 minutes, à 30 min de vélo.

J’ai pédalé comme dans un cartoon et me suis retrouvée au ciné à regarder, le cœur battant comme si j’attendais sa sortie depuis 7 ans, Duel a Monte Carlo del Norte (compliqué), Slide en vo (simple).

C’est un western musical, un conte parodique, une satire grinçante de l’Amérique comme on dit pour être telerama friendly. Je peux les multiplier mais c’est bien plus simple, et bien plus fidèle et élogieux, de dire que c’est le dernier gros délire de Bill Plympton, ce qui s’autojustifie largement. A partir de là, l’histoire importe peu (sinon il y aurait pas tout ce rêve de fièvre du hell bug), la cohérence encore moins, le soin apporté aux finitions est inexistant. En gros c’est un saloon, un sheriff, des gros noms d’Hollywood qui veulent tourner dans le village, un maire véreux qui veut construire un casino là où les pêcheurs vivent, une prostituée qui veut chanter à la place du chanteur, un joueur de slide qui est aussi cowboy. Mais c’est vraiment pas très important.

Il vaut mieux éteindre la lumière et se laisser bercer par les ombres et la musique country, en admirant la créativité et l'humour régressif du MAÎTRE DE L’ANIMATION INDÉPENDANTE, la colorisation sépia (maladroitement entrecoupée de scènes en couleurs faites en france cocoricooo qui permettent de justifier les crédits du CNC je crois??), la liberté évidente que s’offre toute l’équipe.

Sous le feutre de Bill Plympton, les héros sont silencieux et les méchants trop bavards. Les premiers aiment la musique lente, qui prend son temps, comme bill qui met 7 ans à faire son film; trop lente au goût des seconds (->les sans âmes de chez disney). Les femmes défendent leurs droits à défendre leur terre ou vivre de leur art, mais western oblige, elles sont folles du héros et se font briser le cœur. Ce sont aussi presque toutes des prostituées dont les seins, les lèvres, les fesses et les cils gigotent dans tous les plans et dans tous les sens.

Bill aime les corps grotesques, les visages difformes, les voix caricaturales. Il prend un plaisir manifeste à allonger les lignes et doubler les proportions. Il a des idées bizarres, inattendues, qui n'ont jamais trouvé son public dans son pays, où il est largement sous-distribué. Il traîne un peu parfois, met des longueurs, comme un enfant qui s’amuse trop pour se rendre compte que c’est l’heure de rentrer. Mais aussi comme un comédien qu’on rappelle trois fois sur scène après la fin du spectacle, pour le plaisir de le voir un peu plus longtemps.

Le film se termine. Bill en PERSONNE entre dans la salle. Je suis presque un peu émue de découvrir le visage de mon idole, un homme que je ne connaissais pas encore il y a 4 heures. Grand, élancé, il porte un chapeau de cow-boy et un short rose, ça me semble parfait. Il ne peut rien faire qui me déçoive puisque ça a si bien commencé entre nous. Il prend le micro, il va m’éclairer, m’inspirer, je m’apprête à boire ses paroles et à faire de ce moment un des temps forts de mon autobiographie dans 50 ans.

« Hi guys. I loved making this movie because there’s country music in it and I love country music. There are a lot of bad guys in it as well. I love drawing bad guys it’s so fun. Enjoy the film and join me outside after. I’ll be selling original artwork from the movie. Bye! Don’t forget to come and buy stuff outside after so I can make another movie. » applaudissements légers

J’ai la bouche un peu sèche. Une sorte d’arrière goût poussiéreux, sûrement le même qu'un cow boy qui vient de se faire shooter en duel ressent en tombant devant le saloon, tué par celui qu’il voyait comme son allié. But I’ll let it slide this time, because it was reeeeally fun

canutins
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le 25 sept. 2024

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